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enfance. C’est ainsi que l’œil se présente toujours de face, même dans les figures de profil, et que les deux pieds sont tournés dans le même sens. La science de l’observation ne manquait pourtant pas à ces premiers artistes, et l’on s’étonne, en étudiant leurs productions, de l’exactitude avec laquelle le caractère des différentes races humaines, le mouvement des animaux, et jusqu’à des accessoires en apparence indifférens, sont généralement exprimés.

Jusqu’à ce jour enfin, on avait pu croire que l’art assyrien s’était renfermé dans certaines limites exceptionnelles, et se bornait, à une sorte d’application exclusive de la statuaire polychrome à la décoration monumentale : une découverte toute récente est venue prouver que la peinture dans son application la plus durable et la statuaire dans son expression la plus élevée concouraient également à la décoration de ces édifices.

Nous n’avons pas à refaire ici l’histoire des découvertes successives qui ont amené la résurrection de cet art si longtemps perdu[1]. On sait comment les Anglais, mettant à profit les premiers travaux de M. Botta, ont simultanément exploré les principaux monticules qui s’élèvent aux environs de Mossoul. Des sculptures et un grand nombre d’objets précieux recueillis par MM. Layard, Rawlinson et d’autres encore, à Khorsabad, à Nimroud, au Kouyoundjeck, ont formé la belle galerie assyrienne du British Muséum. La France, qui avait donné la première impulsion, ne pouvait laisser le champ libre aux missionnaires anglais, et l’on se rappelle que, vers la fin de 1851, M. Place, nommé consul de France à Mossoul, avait été chargé de reprendre les fouilles commencées par M. Botta sur le monticule de Khorsabad. C’est l’historique des travaux et la série des découvertes qui, depuis le commencement de l’année 1852, ont signalé cette nouvelle campagne archéologique, que nous voudrions surtout faire connaître ici avec quelque détail en nous aidant des rapports inédits de l’explorateur français.

Pour se conformer aux instructions que le gouvernement français et l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres lui avaient données, M. Place devait reprendre les fouilles commencées a Khorsabad par M. Botta, et se livrer à l’exploration des nombreux monticules artificiels qui s’élèvent aux alentours de Mossoul, dans cette vaste plaine formant aux environs de la ville, sur la rive gauche du Tigre, une sorte de demi-cercle dont ce fleuve serait la corde. Avant tout, il fallait se livrer à une étude sérieuse des travaux entrepris par les Anglaisa Nimroud et au Kouyoundjeck. Les fouilles du dernier de ces

  1. Ici même (livraisons du 15 juin et du 1er juillet 1845), les résultats des premières fouilles faites à Ninive ont été appréciés par M. Eugène Flandin.