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aussi longtemps que les pirates se sont tenus éloignés de notre établissement et ont respecté les navires anglais, je ne me suis point cru obligé d’intervenir. Ces déprédations cependant sont devenues plus fréquentes ; elles ont eu lieu dans le voisinage même de cette colonie. Récemment, une jonque appartenant à un sujet de sa majesté britannique a été capturée près de Haï-nan, et le bruit a couru qu’un autre navire anglais, attendu depuis longtemps à Hong-kong, était également tombé entre les mains des pirates. J’ai dû envoyer un bâtiment de guerre à la recherche de ce dernier navire. Le bâtiment que j’ai expédié a rencontré le 5 septembre, dans la baie de Tien-pak, la flotte de pirates et a détruit cinq de leurs jonques ; un autre navire, expédié le 8 septembre pour le même objet, a détruit également cinq jonques. Ces pirates faisaient tous partie de la flotte de Shap-ng-tsai ; des bateaux chinois qu’ils avaient inquiétés nous les ont signalés, et les autorités de la côte, applaudissant à nos succès, ont confirmé ces dépositions.

« Il est bien évident que vos autorités maritimes n’ont pas le pouvoir de détruire ou de disperser ces malfaiteurs. Aujourd’hui que ces misérables ont osé s’approcher de notre île, je suis résolu à les faire poursuivre partout où ils se réfugieront. Un de leurs chefs est ce Chui-a-poo qui, au mois de mars donner, a osé assassiner sur le territoire même de Hong-kong deux officiers anglais. Deux fois déjà j’ai appelé l’attention de votre excellence sur cet outrage commis par un de vos compatriotes, qui s’est empressé de quitter l’île, soumise à ma juridiction. Ce malfaiteur est sans doute aujourd’hui réfugié sur votre territoire, vous n’avez rien fait jusqu’ici pour le saisir. J’essaierai donc de le faire arrêter moi-même. Si quelque malentendu de notre part occasionne des accidens regrettables, on n’en pourra jeter le blâme que sur votre excellence, qui eût dû s’être emparée déjà de ce meurtrier. Je sais bien qu’il peut y avoir quelque difficulté à effectuer cette capture ; mais je suis convaincu que, si votre excellence voulait prendre les mesures nécessaires, elle serait bientôt en état de m’envoyer l’assassin pour que je pusse le faire juger et punir. Voilà cinq mois que ce meurtre a eu lieu, mais il n’est point effacé de ma mémoire ; il ne s’en effacera que lorsque j’aurai obtenu satisfaction d’un aussi abominable outrage. »

Le gouverneur de Hong-kong, en terminant cette lettre, informait le vice-roi qu’il préparait une nouvelle expédition contre les pirates, qu’il accepterait avec joie le concours et l’assistance des autorités chinoises, mais que, dût cette coopération lui manquer comme par le passé, il n’en chercherait pas moins l’occasion de poursuivre jusqu’en leur dernier repaire ces ennemis du genre humain.

L’amiral Collier, qui montait le vaisseau de 74 le Hastings, secondait avec une juvénile ardeur, malgré son âge avancé, les projets de M. Bonham. Dans les premiers jours d’octobre, il expédia le Fury, le Phegethon et le brick le Columbine dans le golfe de Haïnan, pour y chercher les débris de la flotte de Shap-ng-tsai. Il attendit en vain des nouvelles de cette expédition ; les jours s’écoulèrent, l’approvisionnement de combustible des steamers devait être depuis