Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 3.djvu/672

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sous le nom de la maison Roderigue Hortalez et Cie ; le second, la ratification du contrat que le congrès ou plutôt le comité du commerce, sous son nom, a passé avec le sieur Théveneau de Francy, agent du sieur Caron de Beaumarchais. M. Franklin et ses collègues désirent connaître les articles qui leur ont été fournis par le roi et ceux que M. de Beaumarchais leur a fournis pour son compte particulier, et ils m’insinuent que le congrès est dans la persuasion que tout ou au moins une grande partie de ce qui lui a été envoyé est pour le compte de sa majesté. Je leur ai répondu une le roi ne leur a rien fourni, qu’il a simplement permis à M. de Beaumarchais de se pourvoir dans ses arsenaux, à la charge de remplacement ; qu’au surplus j’interviendrais avec plaisir pour qu’ils ne fussent point pressés pour le remboursement des objets militaires. »


Quant au nouveau contrat passé entre Beaumarchais et le congrès, le ministre ajoutait qu’il n’avait point de conseil à donner sur la ratification de ce traité, n’étant point chargé de répondre des engagemens de la maison Roderigue Hortalez et Cie.

Dans cette réponse de M. de Vergennes, très nette en ce qui touche les droits de Beaumarchais comme créancier du congrès, il y avait deux choses : une réticence commandée par la politique, et qui consistait à passer sous silence la subvention pécuniaire secrètement accordée à Beaumarchais avant la rupture entre la France et l’Angleterre ; mais il y avait aussi la vérité, qui perçait dans la dernière phrase du ministre relativement aux objets militaires. Cette phrase prouvait que, si Beaumarchais avait été subventionné, il ne l’avait pas été pour envoyer gratis des fournitures, mais pour les envoyer à crédit, en laissant aux débiteurs une assez grande latitude, spécialement pour les munitions de guerre. Or il est évident que Beaumarchais se conformait aux instructions ministérielles, car depuis deux ans, sauf deux cargaisons de 150,000 francs chacune dont il avait été obligé de s’emparer d’autorité, il n’avait pu obtenir un liard pour 5 millions de fournitures militaires ou autres ; et lorsqu’il demandait des à-comptes, on lui répondait par la négation de sa créance, ou on ne lui répondait pas du tout.

En présence de la déclaration formelle du ministre, reproduite et fortifiée dans une note adressée au congrès par M. Gérard, dans laquelle il était dit que le gouvernement français était complètement étranger aux opérations commerciales de Beaumarchais, il fallut bien que le congrès s’exécutât enfin et reconnût l’auteur du Barbier de Séville comme un créancier réel. C’est alors seulement, en janvier 1779, qu’on lui envoya l’adresse si flatteuse que nous avons citée dans le chapitre précédent. En lisant ces mots : « le congrès gémit des contre-temps que vous avez soufferts pour le soutien de ses états, il va prendre les mesures les plus promptes pour l’acquittement de