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sera convoquée. Quel a été le motif sérieux ou le prétexte de l’acte par lequel le cabinet espagnol a suspendu les chambres ? A Madrid, comme à Turin, c’est dans le sénat que s’est formée l’opposition la plus vive contre le ministère ; il faut l’observer néanmoins, c’est dans des conditions bien moins explicables que le sénat espagnol est allé au-devant d’un coup qui était facile à prévoir. C’est au sujet d’une loi sur les chemins de fer que la lutte a éclaté entre le cabinet et le sénat. Le cabinet avait présenté la loi au congrès ; de son côté, le sénat avait été saisi par quelques-uns de ses membres d’une proposition sur le même objet. Le ministère, n’a pu qu’inviter le sénat à ajourner la discussion et le vote de la proposition en présence de la loi émanée de l’initiative du gouvernement. De là est née une lutte, de prérogatives que le sénat a tranchée en sa faveur par un vote, et que le cabinet a tranchée à son tour par la suspension des chambres. Dans le fait, il est bien évident que l’opposition du sénat espagnol reposait sur autre chose que sur la question de savoir si une proposition individuelle serait discutée avant une loi du gouvernement. La vérité est qu’on ne voulait pas que le cabinet actuel restât au pouvoir. Le président du conseil, le comte de San-Luis, a eu beau montrer qu’il avait pris à l’opposition son programme, le rappel du général Narvaez, la convocation des cortès, la suspension de toute décision sur les biens du prince de la Paix, etc. ; il n’en a été ni plus ni moins. Ce qui est bien mieux, C’est qu’il a été montré que le cabinet avait fait tout ce qu’il avait pu à son avènement pour faire accepter les premiers emplois dans l’armée à un certain nombre de généraux. Le cabinet espagnol peut voir aujourd’hui quelle utilité il y a à prendre le programme des oppositions. Ce qu’il y a de plus triste, c’est cette situation où un ministère ne peut pas se présenter devant les chambres sans être immédiatement exposé à une hostilité systématique, et où le parlement ne peut pas rester ouvert un mois sans être frappé de suspension. Tout cela s’enchaîne, tout cela est le fruit des passions personnelles qui ont envahi la politique en Espagne, et cet état singulier, où tout est possible et où rien n’est possible, est de nature assurément à faire réfléchir les hommes intelligens et sensés que compte encore la Péninsule. Pour le moment, la question est de savoir quel usage fera le gouvernement actuel du pouvoir discrétionnaire qu’il a ressaisi comme les cabinets précédens, après avoir essayé de faire autrement qu’eux, fera-t-il des élections nouvelles ? laissera-t-il les chambres indéfiniment suspendues’ ? On conviendra qu’en fait de régularité politique il serait possible d’atteindre à mieux que cette indéfinissable situation, qui se prolonge pourtant depuis deux ans pour l’Espagne.

La Hollande sait heureusement se préserver de ces péripéties. La seule question qui l’ait agitée pendant l’année est la question religieuse, née de l’organisation de la hiérarchie catholique. Légalement résolue depuis plusieurs mois, n’excitant plus dans le pays l’émotion qu’elle a un moment provoquée, elle se réveillait cependant, il y a peu de jours, dans les élats-généraux à l’occasion de la discussion du budget des cultes. Ce n’est pas sur le fond même que ces récens débats ont porté. Il s’agissait de savoir la vérité sur un point resté des plus obscurs. La cour de Rome avait-elle communiqué au gouvernement néerlandais son intention de procéder à l’organisation du culte catholique, ainsi qu’elle l’affirme ? Cette communication préalable