donc une fièvre qu’eut Alexandre. Il y a dans la description que nous venons de citer assez de traits conservés pour qu’on puisse diagnostiquer, même rétrospectivement, quelle fut la maladie qui emporta le roi. Ce qui est caractéristique, ce sont les apyrexies du commencement. Une fièvre qui dure onze jours, qui offre à son début des intermissions et qui finit par devenir continue, est une de ces fièvres qui sont communes dans les pays chauds, et que plusieurs médecins de L’Algérie ont désignées sous le nom de pseudo-continues. Deux médecins ont déjà essayé de déterminer la maladie d’Alexandre ; mais, s’appuyant sur un passage mal interprété de Justin, ils crurent que la maladie du roi n’avait duré que six jours, et d’ailleurs ils ne se rendirent pas un compte exact de la série des jours dans les Ephémérides royales ; toutefois ce caractère intermittent les avait frappés. — Ainsi Alexandre est mort d’une de ces fièvres qui sont si communes en Algérie, en Grèce, dans l’Inde, et qui certainement règnent encore sur le bord de l’Euphrate. Dès lors, la question d’empoisonnement se trouve résolue ; puisqu’il est établi que son affection fut une fièvre, il est établi par cela même que le poison et encore moins l’eau du Styx n’y furent pour rien.
Eiphippus, dans son livre sur la Sépulture d’Alexandre et d’Éphestion, avait attribué la mort d’Alexandre à des excès de boisson, « Protéas le Macédonien, dit-il, était très grand buveur, jouissant néanmoins d’une bonne santé, car il était habitué. Alexandre, ayant demandé une large coupe, la vida avant Protéas. Celui-ci la prit, donna de grandes louanges au roi, et à son tour but la coupe de manière à s’attirer les applaudissemens de tous les convives. Peu après, Protéas, ayant demandé la même coupe, la vida de nouveau. Alexandre lui fit raison avec courage ; mais il ne put supporter cet excès de boisson ; il se laissa tomber sur son oreiller, et la coupe lui échappa des mains. Ce fut là que commença la maladie dont il mourut, maladie infligée par la colère de Bacchus, à cause qu’il avait pris la ville de Thèbes, patrie de ce dieu. » On déchargera Bacchus de toute intervention dans la maladie du prince. À la vérité, des excès de vin peuvent, débilitant l’économie, la rendre plus accessible aux influences morbifiques ; mais Alexandre était dans un lieu où les causes qui produisent les fièvres intermittentes et rémittentes sont très puissantes ; il venait de faire avec quelques vaisseaux une promenade dans les marais que forme l’Euphrate au-dessous de Babylone, et c’était là un ennemi dangereux contre lequel ne pouvaient rien son invincible phalange et ses victoires, mais duquel un médecin habile et actif l’aurait peut-être préservé.
Que fit-on pour combattre la maladie ? Les Ephémérides royales, au moins dans les extraits qui nous ont été conservés par Arrien et Plutarque, omettent toute mention des médecins et des secours médicaux ;