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d’autres destinées sous l’influence, d’un climat différent et d’une nature plus poétique. Il reconnaît dans cette branche de l’émigration primitive la race brahmanique envahissant l’Hindoustan par le nord-onest, après avoir fait, à Bamiân, une halte indiquée par les monumens[1], et traversant l’Indus pour s’établir d’abord dans la région comprise entre l’Himalaya et les monts Vindhya[2], puis occupant successivement tout le pays. Elle n’avait pas trouvé sa science et sa philosophie dans l’Inde ; elle en avait apporté au moins le germe, des régions trans-sindhiennes, etc. Telles sont les principales propositions qui, dans l’opinion de Torrens, découlent nécessairement des faits archéologiques aujourd’hui connus.

Serrant la question de plus près encore en ce qui touche à l’histoire de l’Hindoustan, Hodgson, dans les mémoires dont il a enrichi, comme Torrens, le Journal de la Société asiatique du Bengale, fait remarquer que la population idolâtre de l’Inde se divise en deux grandes classes : les Ariens ou immigrans, et les Tamouliens ou aborigènes, et que l’unité de la famille arienne, depuis le pays de Galles, dans l’extrême occident de l’Europe, jusqu’au pays d’Assam, extrême orient de l’Inde anglaise[3], a été démontrée par les recherches linguistiques. Divers détachemens de cette grande famille se sont établis dans tous les climats compris entre l’équateur et le cercle arctique. Démêler l’affiliation de ces diverses races par l’étude critique des langues, malgré les altérations produites par la marche variée des civilisations, malgré les altérations non moins remarquables résultant inévitablement de l’influence des climats sur la constitution physique, telle était la tâche herculéenne qu’il s’agissait de mener à bien. Quant à la race tamoulienne, bornée à l’Inde, elle semblait offrir un sujet d’étude moins intéressant et moins utile, cette étude embrasse néanmoins des questions de la plus haute importance. La plupart des Tamouliens sont aujourd’hui sujets britanniques : on les compte par millions. Ils s’étendent depuis le cap Comorin, au sud, jusqu’à la région des neiges éternelles ; dans chaque contrée boisée ou montagneuse du vaste continent de l’Inde, il existe des centaines de milliers de ces créatures humaines qui, depuis trois mille ans au moins, suivant Hodgson, y vivent dans un état peu différent de celui dans lequel se trouvaient les Germains au temps de Tacite. Ils paraissent, à quelque point de leur habitat sporadique qu’on les observe, aussi supérieurs aux Hindous ariens par leur exemption de tous préjugés

  1. ) Voyez la description de ces monumens donnée dans l’Ayin-Akbary, et celle de Burnes (p. 156 à 163 du IIe volume de l’édition in-12), écrites à trois siècles de distance.
  2. Voyez Lois de Manou, liv. II, sl. 17 à 24, traduction de Loiseleur-Deslongchamps. Paris 1833, in-8o.
  3. Sur une zone de 90 degrés de longitude, ou de plus de deux mille lieues d’étendue.