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fut d’obtenir de cette assemblée une loi d’élection dont les dispositions, trop exclusivement dirigées contre le parti qui venait de succomber, trop favorables à l’opinion libérale et démocratique, avaient au moins, pour le moment, l’avantage de mettre à l’abri de tout retour un succès si laborieusement conquis. L’année suivante, une autre loi non moins importante et conçue dans le même esprit organisa la force militaire sur des bases qui devaient la soustraire à l’ascendant du parti de la cour et lui donner un caractère vraiment national, mais qui peut-être, dans les conjonctures où l’on se trouvait alors, ne la mettaient pas suffisamment à l’abri des influences hostiles à la royauté restaurée.

Les événemens postérieurs ont pu inspirer à beaucoup d’esprits qui avaient d’abord approuvé la conduite du gouvernement de Louis XVIII des doutes sur la sagesse de cette politique ou tout au moins des développemens qu’elle ne tarda pas à recevoir, mais il faudrait méconnaître l’évidence pour nier que son premier résultat ait été de rétablir le calme dans le royaume, livré alors aux plus mortelles angoisses, et de rendre confiance aux gouvernemens étrangers dans l’avenir d’un pouvoir qu’ils avaient cru menacé des plus extrêmes périls. L’empereur Alexandre commença lui-même à espérer que l’œuvre de la restauration pourrait s’affermir, et l’intimité de plus en plus étroite des rapports que son envoyé entretenait avec le duc de Richelieu ne pouvait manquer de dissiper peu à peu les préventions dont ce prince avait été si longtemps animé contre la royauté bourbonienne. À partir de ce moment, l’empereur de Russie se montra constamment, dans les conseils de l’alliance, le défenseur des intérêts français. Les complots, les intrigues qui s’ourdissaient en Belgique furent réprimés par les mesures de police que le roi des Pays-Bas se décida enfin à prendre contre les réfugiés et contre les journaux incendiaires par lesquels ils attaquaient le gouvernement de Louis XVIII. Longtemps il avait résisté aux réclamations de ce gouvernement, trop faible encore pour être en mesure de se faire respecter. Les représentations énergiques des cours alliées, de la Russie surtout, le déterminèrent enfin à ne plus tolérer des agressions qui d’ailleurs, par suite de l’amélioration de l’état de la France, présentaient de jour en jour moins de chances de succès.

La conférence de Paris se donna beaucoup de mouvement pour arranger cette affaire délicate ; elle y intervint même parfois avec une vivacité impérieuse qui, en blessant les susceptibilités du roi Guillaume, eût pu créer des difficultés nouvelles, et que le cabinet de Londres n’approuva pas complètement. Cette conférence, comme toutes les réunions de cette espèce, avait une tendance naturelle à étendre ses attributions, et se considérant, ce qui était vrai, comme préposée a la surveillance des plus grands intérêts de la paix et de