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ni ne le doivent ; mais elles sont à leur plus haut point de gloire quand ceux qui ne s’y attachent pas les connaissent assez pour en sentir le prix et la beauté.

La question des races humaines a été traitée l’année dernière dans deux ouvrages importans, le Cours de Physiologie de M. Bérard et l’Homme et les Races humaines de M. Hollard. Ce ne sont certes pas les seuls travaux publiés sur cette question ; depuis vingt ans, les physiologistes et les philosophes cherchent à la résoudre, mais ces deux livres sont les plus récens, et, pour les livres scientifiques, les plus récens sont d’ordinaire les meilleurs. Ils sont en outre conçus avec impartialité et écrits dans des opinions différentes par deux hommes savans et distingués. Nous les prendrons pour guides dans cette étude.

Le caractère le plus évident, celui qui nous frappe le plus, lorsque nous examinons deux hommes d’origine différente, c’est la coloration de la peau. Voltaire disait : « Le premier blanc qui vit un nègre dut être bien étonné, mais le raisonneur qui m’assure que le nègre vient du blanc m’étonne bien davantage. » Outre cette différence du blanc au noir, il existe d’autres variétés de coloration non moins caractéristiques. Ainsi la plupart des Américains sont cuivrés. La peau est jaune chez les Malais, feuille-morte chez les Hottentots, olivâtre chez les Polynésiens, etc. L’iris est tantôt noir, tantôt brun, tantôt même tout à fait incolore, comme chez les albinos ; mais dans ce dernier cas ce n’est point un caractère important, car il n’existe pas de peuples d’albinos, c’est une simple difformité accidentelle. Le système pileux offre aussi des diversités considérables ; tantôt les poils couvrent le corps tout entier, tantôt la peau est glabre et parfaitement lisse, chez les Américains par exemple, et la tête seule est couverte de cheveux. Ces cheveux mêmes sont lisses chez les Européens, crépus et laineux chez certains nègres, rares chez les peuplades du Nord, très abondans chez quelques nations méridionales, les Papous en particulier. Sous le rapport de la forme du reste, les différences sont plus apparentes que réelles, et il ne faut pas identifier, comme on l’a fait parfois, la chevelure du nègre avec la toison de la brebis. Il est vrai que chez le premier comme chez la seconde, les poils présentent la même apparence, que dans les deux cas aussi ils sont enduits d’une sorte d’huile grasse douce au toucher ; mais la conformation anatomique est différente. Les filamens d’une toison présentent de petites aspérités qui leur permettent de se feutrer, et sont plus épais au bord libre qu’à leur autre extrémité, ce qui n’existe pas chez le nègre. On ne pourrait faire du drap, ni aucune espèce d’étoffe, analogue aux étoffes de laine, avec les cheveux des noirs. Cependant la forme des poils peut varier d’un individu à l’autre. On a remarqué qu’ils sont d’autant plus aplatis qu’ils frisent plus facilement. Ainsi ils sont cylindriques chez les Européens, mais aplatis chez les nègres et surtout chez les Papous, si remarquables par leur chevelure abondante et bouclée, qui s’élève parfois à plus d’un pied au-dessus de leur tête. La longueur des cheveux est aussi très variable. Chez les Européens et les Américains, surtout parmi les femmes, ils peuvent tomber jusqu’aux genoux et parfois même jusqu’à terre. Ils sont plus courts chez les peuples de couleur foncée ; les nègres, par exemple, ont rarement des cheveux qui excèdent une longueur d’un décimètre. Quant à la