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« Rapides et animés d’un même esprit, venez avec bonté, ne vous éloignez pas, vous qui faites courber les êtres les plus forts. — Ô grands Marouts,… venez aujourd’hui à notre sacrifice sur vos chars brillans aux roues solides… — Nous connaissons la force terrible de ces fils de Roudra, de ces puissans Marouts qui lancent l’onde rapide et pénétrante. — Ils se précipitent sur les mondes, d’autant plus tourmentés qu’ils sont plus solides ; ils confondent le ciel et la terre. Les airs frémissent quand vous venez, brillans et couverts de vos armures éclatantes. — Sur votre route, les montagnes, les arbres, les corps les plus fermes gémissent ; la terre tremble sous vos pas. »


Ces brises triomphantes feraient bien vite éclater les outres d’Éole et se riraient du quos ego ! Dans les hymnes védiques, les Marouts sont une puissance de premier ordre. Montés sur des chars traînés par des daims, vainqueurs irrésistibles, héros armés du glaive exterminateur, ils ont pour père et pour chef Roudra (le Terrible), symbole de l’ouragan, de ces trombes dévastatrices qui parcourent comme un fléau les régions tropicales. Vienne la légende qui s’inspire de ces personnifications produites par le lyrisme des anciens poètes, et ce même Roudra sera adoré avec terreur comme l’une des formes de Civa, le dieu destructeur, la troisième divinité de la triade indienne. Puis à côté de cette croyance, qui rentre dans le domaine de la fable, se placera l’explication donnée par la philosophie, dont le rôle est de chercher à se rendre compte de, rapports de l’homme avec la nature : le Vent, dépouillé de ses attributs divins, ne sera plus que l’élément tangible, lequel correspond au toucher dans la série des cinq sens.


III.

Nous ne nous étendrons pas davantage sur le caractère particulier de chacun des dieux invoqués dans les hymnes au Rig-Véda, il faudrait multiplier à l’infini les citations d’un ouvrage que tout le monde peut consulter ; mais il nous semble nécessaire d’insister sur quelques hymnes d’un ordre et d’un genre différent, placés dans la dernière section, et qui tranchent assez fortement sur l’ensemble de ces chants sacrés. Nous voulons parler de ceux qui ont trait à des actes civils et politiques, comme aussi de ceux où l’idée philosophique et une certaine fantaisie poétique se mêlent au sentiment religieux. Évidemment les odes dans lesquelles la question de l’âme universelle et la nature de cette âme se trouve dogmatiquement traitée ne sont pas de la première époque védique ; elles appartiennent plutôt à celle cil furent écrits les Oupanichads, qui forment l’appendice théologique et philosophique des Védas. La piété naïve qui a dicté les invocations à Agni et à Indra fait place à la réflexion ; la philosophie va naître. Ces dieux dont on implorait à genoux l’assistance et la protection, on va s’assurer s’ils existent bien réellement sous les formes