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que pour s’arranger sur l’exécution des articles de l’acte de la fédération germanique… — M. de Capodistrias, dont nous connaissons tous les sophismes et qui nous a donné tant de fil à retordre à Aix-la-Chapelle, s’est mis dans la tête que nous ne visons à rien moins qu’à changer l’acte de fédération tel qu’il a été garanti par les puissances, que l’Autriche et la Prusse veulent empiéter sur la liberté et la souveraineté des petits ou moindres états de l’Allemagne ; il craint la diminution de l’influence russe et se plaît, en puisant ses nouvelles et ses argumens dans les feuilles du parti révolutionnaire en France et dans les Pays-Bas, toutes remplies de mensonges, à tenir un langage d’improbation à l’égard des mesures prises à Carlsbad, à nourrir par-là le germe de mécontentement que l’ambition et les vues de la Bavière et du Wurtemberg n’ont cessé de conserver depuis le congrès de Vienne et à instruire les ministres de Russie à l’étranger dans un sens peu fait pour seconder les vues tout à fait pures et conformes aux traités et aux circonstances que nous partageons avec l’Autriche et la grande majorité des états allemands. Cette marche ne peut qu’opérer d’une manière très nuisible pour le bien général. — Dans la manière de voir du comte Capodistrias, il croit devoir consulter votre cour, milord, et, perdant de vue que les conférences de Vienne et de Carlsbad sont absolument dans la ligne de l’acte de la fédération et que nos alliés devraient nous exciter à prendre les mesures dont il est question si nous pouvions les négliger, il sonnerait la défiance et servirait le parti révolutionnaire, si le ministère anglais était moins bien informé, s’il n’était à même de se procurer les notions les plus exactes… Il faut que j’ajoute que l’empereur de Russie est lui-même dans de très bons principes, et que ce ne sont que les notions erronées et les opinions du comte Capodistrias qui l’entraînent à agir, en quelque façon, en opposition avec ses propres sentimens… »


Le prince de Hardenberg annonçait en même temps qu’il allait communiquer à l’envoyé d’Angleterre les rapports reçus de vienne sur les délibérations préliminaires qui y étaient déjà engagées, et il exprimait l’espérance que l’esprit juste et conciliant de lord Castlereagh tirerait parti de ces communications confidentielles pour réfuter victorieusement les visions de M. Capodistrias.

Lord Castlereagh justifia la confiance que lui témoignait le chef du cabinet prussien. Le 14 janvier 1820, en réponse aux ouvertures du cabinet de Saint-Pétersbourg, il écrivit au comte de Lieven, ambassadeur de Russie à Londres, une très longue dépêche, rédigée avec beaucoup de ménagemens, mais qui avait pour but d’établir que, dans les conjonctures où l’on se trouvait, une intervention des puissances étrangères à l’Allemagne dans les affaires de la confédération ne serait pas justifiée. Dans une autre lettre qu’il adressa le même jour à son frère, lord Stewart, ambassadeur d’Angleterre à Vienne, pour le charger de communiquer cette pièce à M. de Metternich, il lui recommanda de conseiller à ce ministre de ne pas prolonger la polémique engagée entre la Russie et l’Autriche sur cette délicate question, et qui ne pouvait avoir d’autre effet que