Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 8.djvu/759

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Hunnougours, puis les Huns-Ephthalites, et ensuite les Sabires, qu’il faillit exterminer. Des rivages de la Mer-Caspienne, qu’habitaient ces peuplades, passant à ceux de la Mer-Noire, il se jeta sur les Outigours, en guerre alors avec les Coutrigours, et sans s’inquiéter si les premiers étaient amis et les seconds ennemis des Romains, il les traita exactement de la même façon : déjà affaiblies par leurs guerres acharnées, les deux hordes succombèrent presque sans résistance, et leurs débris incorporés allèrent grossir la horde des Ouar-Khouni. Maître des rives du Dnieper, le kha-kan se trouva en face des Antes, qui essayèrent de l’arrêter, mais qui furent battus. Un incident de cette guerre montra le peu de respect qu’avaient les Ouar-Khouni pour le droit des gens observé pourtant par les nations les plus sauvages. Les Slaves, voulant traiter du rachat de leurs prisonniers et sonder les dispositions de l’ennemi au sujet de la paix, lui avaient député un certain Mésamir, beau parleur, bouffi de vanité, mais qui jouissait d’un grand crédit chez les siens. Mésamir aborda le kha-kan avec un discours plein d’arrogance et de menaces, et qui ressemblait plus à une déclaration de guerre perpétuelle qu’à une offre de paix. Le kha-kan restait tout interdit, quand un de ses intimes conseillers, que l’histoire appelle Cotragheg ou Coutragher, et qui pouvait bien être un des chefs coutrigours entré dans le conseil des Avars, le prit en particulier et lui dit : « Cet homme-ci exerce dans son pays par son bavardage une autorité toute-puissante ; s’il veut que les Slaves te résistent, ils te résisteront tous jusqu’au dernier. Tue-le et jette-toi ensuite sur eux, c’est ce que tu as de mieux à Faire. » Le kha-kan trouva ce conseil bon, et fit tuer Mésamir sans souci du titre d’ambassadeur qui rendait cet homme inviolable.

Les Ouar-Khouni avaient ainsi tourné la Mer-Noire, et, descendant à travers les plaines pontiques, de proche en proche ils arrivèrent au Danube. On était alors en 562, et il y avait cinq ans qu’ils guerroyaient ou prétendaient guerroyer pour le service de Rome. Leur avant-garde, lancée avec ardeur, passa le delta du fleuve, et pénétra dans la petite Scythie ; mais le kha-kan fit halte avec le gros de l’armée sur la rive gauche, où il planta ses tentes et dressa son camp de chariots ; en même temps il faisait demander à l’officier qui commandait les postes romains de la rive droite qu’on lui montrât les terres que l’empereur Justinien lui avait destinées. Fort embarrassé de répondre, l’officier l’engagea à s’adresser directement à l’empereur au moyen d’une ambassade qu’il se chargeait de faire parvenir à Constantinople, et le kha-kan y consentit. Au nombre des personnages qui composèrent l’ambassade se trouva un certain OEcounimos, qu’à la physionomie de son nom on peut prendre pour un Grec des villes pontiques, enlevé peut-être par les Avars, auxquels il servait d’interprète. Cet OEcounimos, pour reconnaître le