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Dans les classifications les plus généralement suivies, les névroptères succèdent aux coléoptères, et nous aurions à nous en occuper dès à présent; mais, pour procéder graduellement dans l’étude du phénomène qui nous occupe, nous intervertirons l’ordre zoologique, et passerons d’abord aux hyménoptères. À ce groupe appartient la famille des ichneumoniens, qui rend chaque année à nos jardins, à nos champs, à nos forêts, des services aussi importans que peu connus, en détruisant par myriades leurs plus redoutables ennemis. Parmi tant de petits êtres utiles, nous en choisirons un dont l’histoire se lie à celle de la piéride du chou, et a occupé tour à tour Goëdaert, Swammerdam, Vallisnieri, Réaumur. Le microgaster pelotonné (microgaster glomeratus) ressemble à une petite mouche à quatre ailes soutenues par des nervures qui dessinent de larges cellules, au corps noir, aux pattes jaunes, aux yeux velus, aux antennes sans cesse en mouvement. Chaque femelle porte en outre à l’extrémité de son abdomen une longue tarière, sorte d’aiguillon composé de trois pièces, et dont nous allons voir les usages. Lorsqu’une de ces femelles veut pondre, elle se met en quête des chenilles de piéride : elle fond sur la première venue, se cramponne sur son dos, perce la peau d’un coup de tarière et enfonce profondément cet instrument, dont les pièces mobiles forment une sorte de canal. Un œuf se détache alors de l’ovaire, et, glissant le long de ce tube, est déposé dans les tissus de la chenille. Le microgaster retire ensuite son aiguillon, fait quelques pas, s’arrête, et recommence le même manège. En vain la chenille se tord à chaque nouvelle piqûre; son ennemie poursuit tranquillement jusqu’à ce que la ponte soit achevée et que quarante à cinquante œufs aient été mis ainsi en lieu de sûreté. Cela fait, elle s’envole et ne tarde pas à périr. Dès après son départ, la chenille ne donne aucun signe de souffrance; ses blessures se cicatrisent, elle change de peau et subit sa première métamorphose comme s’il ne s’était rien passé; mais elle ne va pas au-delà, et de cette chrysalide sortent bientôt, au lieu d’un papillon, autant de petits vers que le microgaster avait pondu d’œufs.

En effet, chacun de ceux-ci a produit une larve à corps lisse, blanc, dépourvu de toute trace de pieds, à tête à demi cachée sous une sorte de capuchon, mais munie d’un appareil masticateur très propre à attaquer les tissus de la chenille. Toutes ces larves se sont mises à ronger autour d’elles, ménageant d’abord avec grand soin les organes essentiels, et ne s’attaquant qu’à la graisse qui les enveloppe et les réunit. Puis, devenues plus fortes et plus voraces au moment où leur nourrice involontaire a pris elle-même tout son accroissement et s’est transformée, elles ont achevé de dévorer ce qui restait, et, perçant cette peau qu’elles laissent vide, elles viennent au