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On remarquera que, dans cette classification des nations, il n’y a point la place de la France. Il est clair que le docteur Cumming est embarrassé par les événemens actuels, et qu’il lui semble difficile de concilier l’alliance française avec la prophétie. Un autre interprétateur auquel il en réfère souvent, M. Chamberlain, démontre résolument que la France est sans contredit de la race de Gomer, et que par conséquent elle fera partie de la grande ligue, et alors le docteur Cumming se borne à dire : « Il n’en est pas ainsi aujourd’hui, il n’y en a aucun symptôme; que Dieu nous préserve que cela soit ! . . . Mais il y a une très grande probabilité que l’Autriche, c’est-à-dire Gomer, fils aîné de l’église, que la sœur de Rome, ou l’apostasie grecque, et enfin les mahométans se coaliseront tous les trois, et que d’autre part sera notre noble patrie, pour défendre jusqu’à la fin Dieu, la Bible, la liberté et la vie... »

Quoi qu’il en soit, le dernier résultat doit toujours être la rentrée des Juifs en Palestine, et les événemens contemporains ne font que frayer la voie à cette restauration. Tout le monde connaît l’incomparable chapitre d’Ézéchiel, le trente-septième, qui a été appliqué aussi à la résurrection des corps, celui où les cadavres se recomposent et se relèvent sur leurs pieds, et où le Seigneur dit : «Ces os sont la maison d’Israël... Voici la parole du seigneur Dieu : — J’ouvrirai vos tombeaux, et je vous tirerai de vos sépulcres, et je vous conduirai dans la terre d’Israël... Je prendrai les enfans d’Israël au milieu des nations vers lesquelles ils sont allés, je les rassemblerai de toutes parts, je les ramènerai dans leur terre... »

Qu’on lise aussi ce chant de triomphe, ce cantique d’allégresse et de victoire, le chapitre 60 d’Isaïe. Ce sont là les prophéties; quant aux signes historiques, ils sont dans la durée invincible de la personnalité du peuple juif, dans la convoitise indestructible qu’il entretient pour la terre de ses aïeux, enfin dans l’histoire tout entière de cette race, qui est dans tous les pays et qui n’est d’aucun, qui n’a que des tentes et non des demeures parmi les nations, qui en général ne possède point ce qui est immobile, comme la terre, mais possède tout ce qui est mobile, comme l’or et le papier, afin d’être toujours prête pour l’exode.

Du reste, il n’y a peut-être pas de peuple au monde chez lequel se retrouvent ces signes distinctifs du peuple juif autant que chez le peuple britannique. L’Anglais a un caractère aussi isolé, aussi individuel, aussi insulaire que sa géographie. Nous n’en voudrions d’autre preuve que le rôle qui lui est assigné ici même, dans l’accomplissement des prophéties, par le docteur Cumming. Ainsi tout le genre humain doit être châtié, excepté une seule nation, et naturellement c’est la nation anglaise. Les Anglais représentent les dix justes nécessaires pour sauver le monde; ils sont une race mise à part : « Notre pays, dit ce charitable et modeste prêcheur, notre pays a été séparé des dix tribus, parce qu’il a renoncé au papisme à l’époque de la réformation, et qu’il est resté, malgré toutes ses fautes, un pays protestant; c’est pourquoi il ne subira point les châtimens qui attendent les autres. » Ailleurs