Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 11.djvu/908

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui prédomine. Chacun court à l’absolution. Les confessions à haute voir, et d’individu à individu, se font entendre de tous côtés. Ce sentiment plusieurs fois exprimé par Ovide que l’aveu des fautes en provoque le pardon règne alors exclusivement :

Numen confessis aliquod patet.


Au tremblement de terre de Caracas, qui fit périr vingt-cinq mille hommes, l’évêque, sortant de son palais pour remplir son ministère sacré, fut tellement arrêté à sa sortie par le peuple, qui réclamait ses secours spirituels, qu’il fut atteint et tué par les débris des murs, dont il n’avait pu s’éloigner assez tôt pour être hors de danger. Les instructions qu’on donne aux étrangers pour le cas d’ébranlement du sol ne sont pas rassurantes. Il faut se tenir loin des murs et des collines escarpées, de peur des éboulemens et des matériaux qui s’écroulent. Il faut tenir les bras étendus de droite à gauche, et les jambes écartées d’avant en arrière, pour éviter d’être englouti, si la terre devient comme du sable mouvant, ou si elle se fend en larges crevasses. M. de Humboldt cite un cas où les débris d’un village et les cadavres des habitans furent lancés par-delà un cours d’eau sur les flancs d’une colline opposée. Si le sol est meuble, on craint d’y enfoncer sans retour; s’il est rocheux, il peut se fendre et se refermer ensuite sur les malheureux qui sont tombés dans le gouffre. Quelquefois des eaux bouillantes ont jailli sous les pieds des hommes rassemblés pour fuir le fléau; d’autres fois, des émanations brûlantes ou asphyxiantes se font jour et font périr ceux qui ont échappé aux dangers des murs et des toits renversés. Souvent, comme à la Jamaïque, les maisons voisines du rivage s’enfoncent de manière que la mer arrive à la hauteur des toits. C’est alors qu’un vaisseau qui voguait sur l’ancien quai enfoncé, et au travers des murs et des toits couverts de gens qui s’y étaient réfugiés, sauva comme par miracle un grand nombre d’individus réduits à une position désespérée. Très fréquemment le fond de la mer, obéissant aux secousses de l’écorce terrestre, soulève les eaux plus que ne le font les plus violentes marées, et les pousse en collines que des témoins non prévenus par la frayeur portent à quarante et à soixante pieds de hauteur. Le désastre de l’Hougly, l’une des embouchures du Gange, où toute une contrée fut rasée par un coup de mer en temps calme, celui du Callao, près de Lima, où une immense et subite vague dépassa le toit des maisons et détruisit tous les habitans comme toutes les habitations, sont des exemples de ces raz-de-marée dus indubitablement aux convulsions de la surface de la terre dans la partie qui est recouverte par la mer. Je citerai encore un désastre qui semble personnel à nos académies. Un jeune homme plein d’espérances brillantes voyageait en chaise de poste sur les plages de Cadix le jour du tremblement de terre de Lisbonne. Une colline d’eau d’une hauteur prodigieuse envahit le rivage, et, en rentrant dans l’Océan, emporta sans retour ce jeune voyageur, riche de la gloire de son père et de son aïeul. C’était le fils de Louis Racine, de l’Académie des Inscriptions, le petit-fils de Jean Racine, de l’Académie française.

Je ne partage pas la pensée de ceux qui regardent comme un surcroît de