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Saint-Germain-des-Prés a fourni à M. Hippolyte Flandrin l’occasion de montrer son érudition et la pureté de son goût. M. Sébastien Cornu, à Saint-Merri, a prouvé qu’il avait dignement profité des leçons de son illustre maître, M. Ingres. A Notre-Dame-de-Lorette, MM. Roger, Orsel et Perin ont traité des sujets difficiles avec un rare bonheur. Malheureusement il s’est trouvé dans les bureaux du ministère un juge assez mal inspiré pour confier à M. Blondel une coupole de la même église, et le ridicule de ses compositions a dépassé toutes les craintes de ceux qui connaissaient la valeur de son talent. En somme, dans les peintures murales des églises de Paris, le bon l’emporte sur le mauvais, et nous devons souhaiter que le ministère et la municipalité persévèrent dans la voie où ils sont entrés. La peinture faite sur place, pour un jour connu d’avance, assure aux hommes laborieux un jugement équitable, tandis que des tableaux très bien conçus, exécutés avec finesse, perdent la moitié de leur valeur ou du moins de leur charme par un placement malencontreux.

Ce qui est fâcheux dans la commande des peintures murales, c’est que l’état et la municipalité tiennent souvent trop de compte des exigences ecclésiastiques. Quand il s’agit de distribuer ces travaux, chacun plaide pour son saint, et parfois le saint défendu si chaudement par le curé, par son vicaire, par les marguilliers, n’offre à la peinture qu’un assez piètre sujet. L’artiste a beau s’évertuer, se gratter le front, feuilleter Godescard et même les Bollandistes: il ne trouve pas le thème d’une composition intéressante. Encore s’il avait la ressource de Simonide, s’il pouvait se jeter sur Castor et Pollux; mais non, il est emprisonné dans un cercle de fer, obligé de célébrer des personnages très illustres dans la paroisse, honorés des fabriciens, et parfaitement ignorés du monde entier. Le saint qu’on lui propose a guéri miraculeusement la lèpre ou la cécité : pourquoi donc ne serait-il pas digne du pinceau? Le peintre a beau se récrier et se lamenter sur l’indigence du sujet : on l’accuse de stérilité, il faut bien qu’il se résigne. Le bon sens prescrirait l’emploi d’une autre méthode. L’Ancien et le Nouveau Testament, malgré les compositions nombreuses qu’ils ont déjà suggérées depuis trois siècles aux maîtres les plus habiles, ne sont pas encore des mines épuisées. Il serait sage de préférer à Godescard Moïse et saint Luc. Les légendes qui n’ont qu’un intérêt paroissial devraient être consultées avec une extrême discrétion. Cette réserve faite, nous croyons que le ministère et le conseil municipal, en propageant la peinture murale, rendront un service éclatant aux arts du dessin. Les compositions ingénieuses de M. Gendron demandent grâce pour les larves signées du nom de M. Chassériau. On oublie volontiers l’escalier de la Cour des comptes en voyant avec quelle souplesse, avec quelle variété, le