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des soins, du travail et de l’argent. Quelle substance est plus commune que la chaux ou oxyde de calcium? Elle se trouve dans la pierre à chaux, la craie, le plâtre, les coquilles, les pierres; pourtant, l’affinité de l’oxygène pour le calcium étant considérable, l’oxyde de calcium est peu réductible, et le métal est très cher : il coûte plus de 1,000 fr. le kilogramme. Le prix de ce genre de substances doit varier avec les progrès de la chimie; celui des autres dépend de la minéralogie. Remarquons en passant que les métaux qui servent de monnaies, et dont la valeur doit être peu variable pour ne pas troubler les états et la sécurité même des citoyens, doivent être choisis dans la première des deux catégories, car les chimistes font des découvertes plus rapides et plus imprévues que celles des géologues et des chercheurs d’or.

A quelle cause est due la cherté de l’aluminium? Assurément ce n’est pas à la rareté du minerai. Peu de substances sont aussi communes, et peut-être la centième partie du globe est-elle formée d’aluminium. L’argile, les aluns, le kaolin ou terre à porcelaine, les marnes, le feldspath, le mica, les roches granitiques et les roches argileuses, les roches secondaires comme les terrains primitifs sont des combinaisons ou des mélanges de composés d’aluminium. L’albite, la pétalite, la triphane, la cabradorite, sont des silicates doubles d’alumine et de potasse, de lithine ou de chaux. Le saphir est de l’alumine colorée en bleu, le rubis est de l’alumine colorée en rouge par des oxydes métalliques, le corindon hyalin est de l’alumine incolore et transparente. Les ocres employés dans la peinture, la terre de Sienne sont des mélanges d’argile, d’oxyde de fer et de manganèse. Ainsi l’aluminium n’est pas rare. Il n’est pas question, bien entendu, de l’extraire des dernières substances que j’ai nommées, des rubis ni des saphirs; mais l’argile et l’alun sont des substances fort communes, et dont le prix est peu élevé. Des montagnes entières sont formées d’argile; en Picardie et à la Tolfa, près de Rome, il existe des masses énormes d’alun. C’est donc l’extraction de l’aluminium qui est chère. Elle est assez compliquée, comme on l’a vu; mais ce qui la rend coûteuse, ce sont surtout les quantités de sodium nécessaires à la réaction, et le sodium a lui-même un prix élevé, car la préparation en est difficile. Il est fort avide d’oxygène, et, pour réduire son oxyde, il faut une température très élevée. On pourrait presque dire que le prix d’une substance est proportionnel à son affinité pour l’oxygène. Jusqu’ici, le sodium n’était qu’un produit de laboratoire, une des curiosités de la chimie; on n’avait pas songé à l’employer dans l’industrie. Lors des premières expériences de M. Sainte-Claire Deville, il coûtait 1,000 francs le kilogramme. Or il en faut trois kilogrammes pour extraire du chlorure d’aluminium un kilogramme de métal, ce qui portait de ce chef