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de précautions pour que le gaz mixte ne prenne pas feu en masse, ce qui arriverait infailliblement, si la flamme qui brûle à l’orifice pouvait rétrograder vers l’intérieur du réservoir. Il convient, dans ce cas, de ne faire arriver le mélange explosif que par des tuyaux qui éloignent le réservoir du lieu où l’on produit la combustion, et de faire passer ce gaz au travers de plusieurs toiles métalliques qui ne permettent pas à la flamme de rétrograder. C’est au lieutenant anglais Drummond que l’on doit cette belle illumination, qui rivalise presque avec celle de l’électricité, et qui nous servira de texte pour faire connaître plusieurs particularités curieuses sur la manière dont la chaleur donne naissance à la lumière. Avant d’exposer cette théorie et pour compléter ce qui se rapporte à la lumière Drummond, Drummond light, selon le mot des Anglais, nous dirons que si, après avoir renfermé dans une bouteille flexible de gomme élastique un mélange d’oxygène et d’hydrogène, on souffle dans un mortier à demi plein d’eau savonneuse des bulles de savon, comme le font les enfans avec un petit chalumeau, et qu’ensuite on approche de ces bulles un papier enflammé, on obtient une détonation qu’on ne peut comparer qu’au bruit d’un coup de canon, ou plutôt au bruit plus perçant encore d’un mortier à lancer des bombes. Communément, dans les cours de physique et de chimie où l’on répète cette expérience, une partie notable de l’auditoire reste assourdie pour plusieurs minutes. Or c’est ce mélange explosif qui, emmaganisé dans un réservoir et lancé par une petite ouverture, est enflammé à sa sortie, et vient briser sa flamme peu brillante sur un bâton de craie ou de chaux vive, lequel devient alors tellement-incandescent, que l’œil n’en peut supporter l’éclat. Si cette lumière et celle de l’électricité eussent été plus maniables et surtout moins chères, elles auraient été d’un excellent emploi dans les phares dont nous allons parler, et qui ont pour but de signaler à de grandes distances, malgré le brouillard ou la brume, la présence de la terre et ses dangers aux navires qui approchent des côtes.

Voici quelques notions théoriques sur cette curieuse production de lumière.

Tous les corps échauffés ne deviennent pas lumineux à la même température, c’est-à-dire par le même degré de chaleur. Je me suis assuré par des expériences réitérées que les corps les plus durs sont les premiers à devenir lumineux, en sorte, par exemple, qu’une tige de fer plongée en même temps qu’une tige de cuivre dans une source de chaleur devient lumineuse et incandescente quand la tige de cuivre ne le devient pas. D’après cela, un corps plus mou, un liquide par exemple, aura besoin de plus de chaleur qu’un corps solide pour être lumineux. C’est ce qu’on observe avec le verre qui rougit