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si bien compris cette influence d’une alimentation fortifiante sur la quantité d’ouvrage exécutable en un temps donné, qu’ils imposent, connue condition essentielle, aux hommes mal nourris engagés par eux en Irlande, parfois même en certaines localités du continent, l’obligation d’adopter un régime alimentaire semblable à celui qui permet aux ouvriers anglais un si large emploi de leur force musculaire. Ce dernier régime, bien différent de l’insuffisante ration des Irlandais, est parfaitement approprié aux exigences des rudes travaux accomplis par des hommes robustes. Les chiffres que nous allons citer prouveront que le volume des alimens consommés par l’ouvrier anglais est à peu près trois fois moindre que le volume de la ration d’un ouvrier irlandais ou lombard. La proportion de viande est telle cependant, que l’azote de celle-ci forme près des deux tiers de l’azote total, représentant lui-même plus de 50 pour 100 au-delà des quantités contenues dans la nourriture journalière des ouvriers de l’Irlande.

Régime alimentaire des ouvriers anglais[1] Quantité d’alimens Poids équivalent
d’azote de carbone
Viande de boucherie 0k660 19,8 72,6
Pain blanc 0,750 8,1 221,5
Pommes de terre 1,000 2,4 100
Bière 2,000 1,6 90
Poids total des alimens et de la boisson 4,100 31,9 484,1

Une nourriture aussi abondante ne saurait assurément être utile aux hommes de loisir qui, ménageant trop les forces que la nature leur a départies, usant toutefois d’une alimentation copieuse, laissent accumuler dans leurs tissus des sécrétions adipeuses ont par degrés leur deviennent à charge. Sans doute, à défaut d’un travail ou d’un exercice corporel poussé jusqu’à la fatigue, les hommes placés dans ces conditions devraient se résoudre à adopter un régime moins substantiel, l’usage d’alimens d’une digestion plus facile, pris en moindre quantité ; mais dans ces circonstances même, les relations entre les substances alimentaires animales et végétales devraient encore être convenablement réglées. Telle est du moins la conclusion de la théorie positive qui servit de base à une très utile réforme introduite depuis trois ans avec succès dans le régime des hommes d’étude, des

  1. Relevé pendant les travaux de terrassement du chemin de fer de Rouen.