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de citer, la rouille, est un composé, car on peut en retirer du fer et de l’oxygène. Il est évident que le nombre des corps composés est bien plus considérable que celui des élémens, car deux corps peuvent souvent s’unir en deux, trois, quatre, etc., proportions, et l’on connaît des combinaisons de deux, trois, quatre, etc., corps simples ou composés. On conçoit aussi que le nombre des corps connus soit très variable, et que l’état de la science influe sur la place que chacun d’eux occupe dans la classification. Tantôt les chimistes décomposent un corps considéré comme simple, tantôt ils découvrent qu’une substance que l’on croyait composée est élémentaire. On sait que les anciens ne reconnaissaient que quatre élémens, la terre, le feu, l’eau et l’air ; certains philosophes n’en admettaient que deux ; Thalès croyait que l’eau est le principe de toute chose. Au commencement de ce siècle, lorsque la véritable chimie commença d’être connue, on avait découvert quarante-sept corps simples. Aujourd’hui on en connaît soixante-deux. Il est fort probable qu’un assez grand nombre d’entre eux seront un jour décomposés ; mais dans l’état actuel de la science, nous devons considérer chacun de ces corps comme formé d’atomes identiques, et il est probable que les divers aspects qu’une même substance peut présenter tiennent à des différences dans l’arrangement de ces atomes. Ainsi le corps simple qui porte le nom de carbone est tantôt noir et luisant, et prend le nom de graphite, tantôt gris sous le nom de mine de plomb, tantôt terne et foncé, et c’est alors le charbon, tantôt enfin dur et brillant, et bien connu de tout le monde sous le nom de diamant. On est même allé quelquefois jusqu’à penser que tous les atomes sont semblables, et que leur mode d’arrangement est la seule cause de la diversité des corps. Il n’y aurait ainsi qu’un élément unique, et les combinaisons d’atomes, de forme et de grandeur différentes, mais de nature identique, représenteraient toutes les substances connues. Cette théorie répond assez à l’idée de simplicité que nous aimons à rencontrer dans les procédés de la nature. On a souvent cité pour la défendre les aspects variables et même les propriétés distinctes du charbon et du diamant. Un autre motif a aussi été invoqué, c’est la rareté de certains corps simples et l’abondance de quelques autres. Est-il probable, a-t-on dit, que la nature, qui a composé avec quatre élémens seuls tous les organes des animaux et des plantes, ait accumulé dans la terre tant de corps simples inutiles ? Pourquoi trouve-t-on dans les mines tant de métaux qui ne paraissent servir qu’à exercer l’habileté des chimistes, le mot bdène, le tungstène, le ruthénium, l’erbium, etc. ? Les corps élémentaires de la nature minérale sont bien plus nombreux que ceux de la nature organique ; est-il vraisemblable que la variété des moyens soit si peu en rapport avec la quantité et la valeur des résultats ?