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der Straten Ponthoz, dans un livre dont le litre résume toutes les questions pour le jeune empire américain : le Budget du Brésil, ou Recherches sur les ressources de cet empire dans leurs rapports avec les intérêts européens du commerce et de l’émigration. L’auteur, il est vrai, prend pour point de départ un budget déjà ancien, celui de 1845-1846 : depuis, les ressources du Brésil se sont accrues, son commerce s’est agrandi, une politique vigoureuse et intelligente a porté ses fruits ; mais le budget n’est qu’un cadre où entre l’analyse de tous les élémens de grandeur et aussi de faiblesse de l’empire brésilien. La partie la plus instructive sans nul doute est celle qui traite des richesses latentes du Brésil. Là se révèle sous son double aspect la situation de l’empire sud-américain : d’un côté les immenses élémens d’agrandissement, de l’autre les obstacles à vaincre, les lois à coordonner, les garanties à offrir, les voies de communication à tracer, le sol même à connaître. Une loi a été votée en 1850 pour la délimitation des terres ; mais il reste à l’exécuter. M. van der Straten Ponthoz déduit naturellement de ses observations la nécessité de favoriser l’immigration, l’introduction du travail libre, d’autant plus indispensable aujourd’hui que la traite est abolie. Le meilleur moyen de favoriser l’immigration, de l’appeler, c’est une politique libérale qui associe, franchement et directement l’Europe à la civilisation de cet immense continent, jusqu’ici inutile à la race humaine, quand il n’est pas livré à de vulgaires et sanglantes disputes. ch. de mazade.




THE ENGLISH PRISONERS IN RUSSIA, A PERSONAL NARRATIVE OF THE FIRST LIEUTENANT of H. M. S. Tiger, by Alfred Royer, lieut. R. N.[1].

Le type du touriste admiratif qui n’écrit jamais une phrase sans points d’exclamation, se croit tenu de trouver tous les monumens sublimes, tous les paysages enchanteurs et toutes les auberges excellentes, ce type est connu depuis longtemps ; mais il n’était pas jusque présent sorti de la classe des badauds à prétentions sentimentales. Le lieutenant Royer s’est chargé de démontrer qu’il pouvait se rencontrer dans certaines classes plus sensées et plus honorables. Qu’un dandy, une actrice, un dilettante s’extasient à froid sur les pays qu’ils visitent, rien n’est plus naturel ; mais qu’un officier de marine prisonnier de guerre pousse l’impartialité jusqu’au point d’oublier que le pays dont il fait l’apologie est en lutte armée avec sa propre patrie, voilà ce qui ne s’était pas encore vu. M. Royer a été bien reçu par les autorités russes, il n’a qu’à se louer du général Osten-Sacken, il a contemplé l’auguste figure de l’empereur, il a visité la Russie aux frais de l’état ; les voitures étaient comfortables, les déjeuners et les dîners irréprochables, et M. Royer a conservé de la Russie un souvenir plein de reconnaissance : rien de plus naturel. Il a donc voulu rendre politesse pour politesse, rien de plus juste encore. Seulement nous devons lui dire qu’il a mal choisi son temps et ses moyens. Il pouvait ajourner jusqu’à la paix la publication de son journal,

  1. London, 1854, chez Chapman et Hall.