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TOLLA

iECONDE PARTIE.*

IV.

M*"' Fratief et sa fille ignorèrent ce qui s'était passé au palais Feraldi. Nadine, prévoyant que le départ pour Lariccia précipiterait la marche des événemens, avait aposté Cocomero sur la place des Saints-Apôtres, pour surveiller le camp ennemi. Elle poussa un cri de colère lorsqu'elle vit revenir son espion sur un brancard, la figure en sang et le crâne sensiblement déformé. L'état de son visage expliquait la foulure de Dominique.

Cocomero était un pur Napolitain du quai de Sainte-Lucie, court, trapu, rougeaud, goulu, fainéant, poltron, hébété et fripon comme PoMchinelle en personne. Sa grosse face plate, élargie par une énorme paire de favori-s roux, était toute barbouillée de mauvaises passions; ses petits yeux gris clair trahissaient à certains momens une férocité porcine. Depuis la place des Saints- Apôtres jusqu'à la via Frattina, où logeaient ses maîtresses, il répéta entre ses dents la plus terrible malédiction que l'on connaisse à Rome : Accidente! ce qui veut dire en bon français : « Puisses-tu mourir d'accident, sans confession, damné! » Dans un pays où l'on croit au mauvais œil comme à la sainte Trinité, une malédiction de cette importance équivaut à mille soufflets, et les Romains du Trastévère répondent à un accidente par un coup de couteau; mais Dominique était loin, et Cocomero sacrait tout à son aise, sans aucun respect pour la police ecclésiastique de Rome, qui fait coller aux portes de toutes les bou- (1) Voyez la liTraison du !•' février.