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précieux. Récapitulons d’abord, au point où nous sommes arrivés, les services rendus par le développement successif du crédit à l’industrie et au commerce. Le point de départ de l’industrie et du commerce, c’est la production et l’échange des produits, et le but du crédit, c’est l’accélération indéfinie de la production et des échanges. A quel degré, au moment où il a été créé, le crédit commercial a-t-il trouvé la circulation des produits?

Après l’état de barbarie économique où chacun ne consommait que ce qu’il avait produit et ne produisait que ce qu’il pouvait consommer, la première forme de l’échange, le premier degré de la circulation des produits avait été le troc, forme barbare encore et circulation pleine de lenteur, car elle exigeait le déplacement immédiat et l’échange direct des produits sans offrir de base certaine à leur évaluation comparée. L’intervention des métaux précieux et de la monnaie dans les échanges fut le second progrès de la circulation, et ce fut un progrès immense, le commencement de ce qu’on pourrait appeler l’ère de la civilisation économique. On avait maintenant dans les métaux précieux des produits chers, parce qu’ils coûtaient beaucoup à extraire de la terre, qui se prêtaient par leur éclat aux usages du luxe et des arts, qui étaient faciles à diviser, et gardaient encore la même valeur relative sous le plus petit volume, qui avaient enfin un avantage inestimable sur tous les autres produits qui se consomment, qui s’usent et que le temps détruit, l’avantage de se conserver et d’être presque inaltérables. Les métaux précieux, l’or et l’argent, devinrent les produits types, ceux auxquels se mesura la valeur des autres produits. Convertis en monnaie, ils furent la valeur intermédiaire qui servit aux échanges. Grâce à la monnaie, le prix, l’estimation de la valeur relative de chaque produit reçut sa définition, et en quelque sorte son nom intelligible dans la langue universelle de l’échange. Grâce à la monnaie, la circulation des marchandises fut affranchie des embarras et des lenteurs de l’échange direct. Le producteur en vendant son produit, c’est-à-dire en le troquant contre de l’or ou de l’argent, eut désormais entre les mains une valeur contre laquelle tous les produits s’échangeaient, et qui lui donnait par conséquent le pouvoir d’acquérir, quand il voudrait et où il voudrait, ceux qui lui étaient nécessaires. Ainsi l’apparition des métaux précieux et de la monnaie, c’est la lumière introduite dans les échanges, c’est une communication mutuelle ouverte entre toutes les marchandises, c’est la circulation universelle des produits régularisée. Tel est l’état déjà très avancé au milieu duquel survient le crédit avec l’effet de commerce.

Le crédit, au moyen de l’effet de commerce, commence une troisième phase dans le développement des échanges. Les métaux