Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 2.djvu/929

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cortina, Collado. La pensée du centre parlementaire se résumait toujours dans l’union des maréchaux Espartero et O’Donnell au pouvoir. C’était une initiative sage et vigoureuse au milieu de la dispersion des partis ; mais aussitôt les progressistes purs se réunissaient à leur tour et formaient un autre centre, en déclarant qu’ils ne reconnaissaient pour chef que le duc de la Victoire. C’est de cette réunion que sortait le projet financier qui a triomphé. Au fond, il n’est point difficile de démêler le sens de tous ces mouvemens et de ces combinaisons. C’est toujours la lutte des deux influences, du général O’Donnell et du duc de la Victoire. Le centre parlementaire était soupçonné d’agir de préférence en faveur du ministre de la guerre, le centre progressiste est venu au monde pour soutenir Espartero, et peut-être a-t-il réussi un moment à jeter des défiances dans son esprit. On le voit, depuis deux ans c’est la même situation qui se perpétue sans changer. Comme au premier moment, il s’agit de savoir quelle influence prédominera. Sera-ce le duc de la Victoire ? sera-ce le général O’Donnell ? Ce sont des forces qui ne sont pas arrivées à se combiner pour une action commune, et qui se neutralisent sans autre résultat que de tenir les partis en équilibre. Dès qu’on croit à l’union des deux chefs du cabinet, la situation semble s’améliorer : c’est ce qui a eu lieu il y a quelque temps. Dès qu’on commence à voir naître quelque ombrage, la sécurité disparaît. Le duc de la Victoire n’a point sans doute l’intention de se séparer de son collègue ; mais son esprit écoute facilement toutes les suggestions, et ces suggestions ne lui manquent pas. De son côté, le général O’Donnell, avec une énergie singulière de caractère et un talent remarquable de gouvernement, s’use dans une œuvre impossible, et pendant ce temps le désordre s’étend dans les provinces, les questions les plus graves se réveillent. Ce n’est plus même de l’anarchie morale et politique ; c’est le désordre matériel qui envahit l’Espagne. Depuis peu de temps, les séditions locales se succèdent. À Malaga, une collision a éclaté entre la troupe et la milice nationale, et des coups de feu ont été échangés. Un mouvement à peu près analogue s’est produit plus récemment à Badajoz. En ce moment enfin, c’est Valence qui vient d’être le théâtre d’une insurrection. La conscription a été le prétexte. En réalité, le mouvement paraît avoir été préparé par un des chefs du parti démocratique, qui faisait naguère un voyage à Valence. Cette insurrection, qui a été sanglante, a été promptement comprimée ; mais elle est un symptôme de plus de la situation de l’Espagne. Voici un pays moins troublé, et où la politique prend sans effort une physionomie bien différente. Un des traité les plus saillans du peuple hollandais, c’est que chez lui le sens pratique et l’habitude des choses positives n’excluent nullement les préoccupations d’une autre nature, d’un ordre plus vital et plus élevé. À côté des affaires matérielles, il y a les questions morales où se révèle encore le caractère hollandais. En en effet, les Pays-Bas ne sont point délivrés de cette agitation religieuse qui a commencé il y a quelques années déjà, qui est sans péril sérieux il est vrai, mais qui se ravive aisément de temps à autre, quand un incident vient remettre aux prises les tendances et les opinions diverses. Cette fois l’occasion a été la présentation aux chambres d’un projet de loi sur l’enseignement primaire. En se pénétrant de l’esprit de la loi fondamentale, le gouvernement a rédigé son projet sous l’empire de cette pensée, que l’état, en laissant à chaque culte, pro-