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communes ou intermédiaires, plus conciliables avec la multiplication de la bonne viande.

Le droit qui vient d’être réduit avait toute sorte d’inconvéniens. Il était perçu ad valorem, ce qui donnait lieu à beaucoup de contestations et de fraudes. De plus, il agissait en sens contraire de l’échelle mobile sur les céréales, aggravant le droit à mesure que le prix des laines montait à l’intérieur, c’est-à-dire qu’on avait plus besoin des laines étrangères, et le réduisant à mesure que le prix baissait avec le besoin. Cette anomalie a été autrefois mise en lumière par un ancien député fort compétent en ces matières, M. Muret de Bord. Le droit fixe n’a plus les mêmes défauts.

Cette réduction prête plus que toute autre à la critique, sous le rapport fiscal. Le droit sur les laines à rapporté en 1855 près de 15 millions ; cette recette sera probablement réduite de moitié cette année, c’est une perte sensible pour le trésor. Il n’y a d’autre moyen de l’éviter que de supprimer ce qu’on appelle le drawback. On entend par drawback une somme payée par l’état pour les tissus de laine exportés, et considérée comme le remboursement des droits d’entrée perçus sur la matière première. En réalité, ce prétendu remboursement n’est qu’une prime à l’exportation, car on paie pour toute espèce de tissus, qu’ils soient ou non de laine étrangère. Le montant annuel de cette dépense égale précisément la perte probable sur la recette ; en le supprimant, il n’y aurait rien de changé. Le nouveau décret modifie et réduit le drawback ; c’est quelque chose, ce n’est pas assez. La production annuelle des tissus de laine représente une valeur totale de plus de 500 millions ; quelques millions de plus ou de moins, sur un mouvement d’affaires aussi considérable, n’ont pas beaucoup d’importance. Le prétexte du drawback, le droit d’entrée sur les laines étrangères, étant d’ailleurs supprimé ou atténué, il est naturel que l’effet disparaisse avec la cause, surtout quand on songe que la prime avait pour but de favoriser les consommateurs étrangers aux dépens des Français, anomalie nouvelle qui vient montrer une fois de plus à quels résultats bizarres on peut arriver à force de calcul.

Les autres produits agricoles ne soulèvent pas les mêmes doutes. Il y a eu un temps où l’on a voulu protéger par des droits excessifs les huiles indigènes. La demandé d’huile a fait de tels progrès, qu’elle a triomphé de tous les obstacles ; l’importation des huiles et graines oléagineuses atteint aujourd’hui une valeur de 50 millions, et on ne voit pas que la production nationale en ait souffert. Le prix de l’huile est encore tel que la culture du colza s’étend tous les jours, de manière à exciter pour l’avenir des craintes légitimes, car cette culture épuise le sol quand elle n’est pas très bien entendue, et peut nuire par conséquent à la production des céréales. Il y