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autrement. On exposera à l’influence des rayons lumineux un vase plein d’eau froide : l’eau y éprouvera un réchauffement ; on le mesurera, et l’on en déduira la quantité de chaleur que le soleil verse sur la terre. C’est avec un instrument de ce genre, qu’il a nommé pyrhéliomètre, que M. Pouillet nous a fait apercevoir la puissance du soleil, puissance énorme, car elle pourrait, dans l’espace d’une année, liquéfier une couche de glace qui couvrirait la terre et aurait une épaisseur égale à 31 mètres.

Il n’est pas seulement nécessaire de placer à l’ombre le thermomètre qui doit donner la température de l’air, il faut encore le sous traire à une autre cause de perturbations tout aussi graves, provenant d’une action tout opposée. La terre ne garde pas la chaleur que lui envoie le soleil ; à son tour, elle rayonne vers les espaces célestes, à qui elle rend ce qu’elle a reçu et ce qu’elle possède en propre de calorique, et ces rayons terrestres, traversant eux-mêmes l’atmosphère de bas en haut, y subissent un affaiblissement progressif comme les rayons solaires. Ce qui reste de ce rayonnement, quand il a franchi les limites du milieu gazeux, se perd vers la voûte étoilée. Or il n’est pas difficile de comprendre que, pendant le jour, la terre reçoit plus qu’elle ne rend, ce qui l’échauffé, et que, pendant la nuit, elle perd plus qu’elle ne gagne, ce qui lui donne une température inférieure à celle de l’air.

Cette conséquence tout à fait inattendue exigé une expérience qui la confirme. En voici une qui ne peut laisser aucun doute, elle est due à Wells, et elle est célèbre. Ayant placé dans l’herbe d’un pré, pendant une nuit sereine, deux thermomètres entièrement semblables, il laissa l’un des deux exposé à la libre vue du ciel et couvrit le second avec un mouchoir fixé sur quatre tiges de bois, et qui s’interposait comme un écran entre le ciel et l’instrument. Le premier thermomètre et le second étaient tous les deux entourés par la même couche d’air, et cependant le second se maintint à 6 degrés au-dessus du premier. Le thermomètre libre perdait sa chaleur, qui s’échappait vers le ciel, le thermomètre couvert la conservait et marquait la température de l’air dont il était enveloppé. De ces détails nous tirerons une conclusion prévue : c’est que l’on peut et que l’on doit, en météorologie, faire trois usages différens et nécessaires du thermomètre. Placé à l’ombre et couvert d’un toit protecteur, il indiquera la température de l’air ; soutenu librement sans abri, il marquera par son refroidissement la puissance du rayonnement terrestre. Placé enfin au milieu d’une masse d’eau exposée au soleil dont il indiquera le réchauffement, il servira à connaître la puissance pyrhéliométrique. L’ensemble des résultats obtenus dans ces trois modes d’expérimentation conduira à la connaissance des mouvemens calorifiques