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vous avez, dans le résultat des élections futures, tant de confiance, elles doivent se faire, par le cours ordinaire et légal des choses, dans un an d’ici ; laissez au parlement qui viendra alors à décider quel parti il voudra prendre à l’expiration du bill même qui vous occupe, car ce bill ne doit durer que jusqu’en 1849 ; ne forcez pas la reine à dissoudre aujourd’hui le parlement. Vous pouvez ou rejeter le bill et avoir sur-le-champ ces élections que vous paraissez désirer si vivement, ou accepter le bill et remettre au parlement prochain la question de savoir s’il voudra le repousser ou le reproduire, quand le bill tombera de lui-même en 1849. C’est entre ces deux partis que vos seigneuries ont à choisir. »

Soit effet de l’influence et de l’argument du duc de Wellington, soit que la chambre des lords, ce qui est probable, eût déjà son parti pris, elle suivit le conseil qu’il lui donnait et accepta la seconde lecture du bill à 47 voix de majorité.

Cinq semaines après, le 25 juin, la chambre des communes discutait un bill de répression contre les actes de violence et de désordre en Irlande, déjà adopté par la chambre des lords sur la proposition de lord Saint-Germans. Sous l’empire du désappointement populaire qui avait suivi l’agitation suscitée pour le rappel de l’union des deux royaumes, et au milieu des alarmes ou des souffrances de la disette, les attentats contre la sûreté des personnes et la paix publique s’étaient multipliés dans une progression effrayante. Portés au chiffre de 1 495 en 1844, ils s’étaient élevés en 1845 à 3 642, et ce nombre croissait toujours. Dans cinq comtés surtout, Tipperary, Clare, Roscommon, Limerick et Leitrim, toute sécurité personnelle avait disparu. Pour des observateurs étrangers aux engagemens et aux passions de parti, la nécessité du bill était évidente ; le gouvernement le plus décidé à redresser les griefs qui pèsent sur les peuples doit commencer par réprimer les attentats qui détruisent la société. La discussion n’en fut pas moins vive ; les whigs et les radicaux repoussaient le bill, plus irritant, disaient-ils, qu’efficace. Le cabinet et Peel lui-même le soutinrent énergiquement, et la première lecture fut adoptée à 149 voix de majorité. Fidèles à leurs principes, presque tous les conservateurs, adversaires ou adhérens du cabinet dans la question des grains, votèrent ce jour-là pour le bill irlandais ; mais quand on approcha de la seconde lecture, les conservateurs opposans, de plus en plus courroucés, résolurent de saisir cette occasion pour venger leur injure en renversant le cabinet, et lord George Bentinck, se surpassant lui-même en violence, annonça hautement cette résolution, « Nous avons coutume, dit-il, d’entendre dire au très honorable baronet qu’il ne consentira point à être ministre par tolérance ; il faut qu’il soit étrangement aveuglé par les flatteries de ceux qui l’appro-