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là. Il a nettement précisé le fait physiologique qui ouvre et ferme le cycle des générations. Ce fait c’est la réapparition non-seulement des formes primitives, mais encore de tous les caractères tant physiologiques qu’anatomiques ; c’est en particulier la propagation par œufs fécondés comme à l’ordinaire. Toutes les recherches postérieures ont confirmé cette conclusion, tirée d’abord d’un assez petit nombre de preuves. Là est encore un des plus vrais, un des plus sérieux mérites de M. Steenstrup.

En effet, de ce résultat, que l’auteur danois s’est contenté d’ailleurs de présenter comme relevant de l’observation directe, découlent deux conséquences des plus importantes pour la physiologie générale, et qui me semblent avoir échappé aux savans qui ont traité cette question. — Jusqu’à nos jours, les divers modes de reproduction avaient été considérés comme indépendans les uns des autres, et par suite on leur attribuait une importance biologiquement égale. Qu’il fût œuf, bulbille ou bourgeon, le germe était pour les naturalistes quelque chose de primitif ; l’être auquel il donnait naissance ne datait que de lui. La reproduction gemmipare, au point de vue de la perpétuation des espèces, était donc l’égale de la reproduction par œufs. Évidemment on se trompait. Les bourgeons, les bulbilles, quelque apparence qu’ils revêtent, ne sont que le produit plus ou moins médiat d’un œuf préexistant. Celui-ci seul renfermait le germe essentiel, le germe primaire de toutes les générations qui découlent de lui. Par conséquent les bourgeons ne sont que des germes secondaires, et les êtres résultant de leur développement se rattachent médiatement à l’œuf primitif. — Un autre point établi, c’est que la reproduction gemmipare ne suffit pas à perpétuer l’espèce, et qu’au bout d’un temps déterminé la reproduction par œufs redevient nécessaire. Cette dernière est donc seule fondamentale ; c’est une fonction de premier ordre. La reproduction par bourgeons n’intervient plus que comme accessoire ; c’est une fonction subordonnée. — Nous verrons plus loin tout le jour jeté par ces données bien simples sur le phénomène de la généagénèse.

M. Steenstrup exagéra et faussa ce qu’il y avait de vrai dans ses idées en y cherchant l’interprétation du phénomène en lui-même. Ses doctrines à ce sujet ne sont pas seulement hypothétiques au plus haut degré, elles sont vraiment quelque peu bizarres. Les phases de la multiplication, ou mieux les générations que nous avons appelées scolex, strobila, M. Steenstrup les nomme grand’nourrices, nourrices, etc. Ces mots, l’auteur ne les prend pas seulement au figuré, mais bien dans leur sens propre et absolu. D’après lui, une méduse sous sa forme hydraire a beau produire d’autres polypes, elle n’est pas mère pour cela ; elle n’est pas non plus parent dans le sens