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sans trop de succès ses candidatures électorales dans tout le pays. Après avoir échoué à La Haye, il se présente à une seconde élection, qui a lieu à Leyde, contre M. van Reenen, ancien ministre de l’intérieur et libéral modéré, et la cause du chef du parti ultra-protestant paraît fort compromise à Leyde comme à La Haye, si bien que le cabinet s’occupe, dit-on, de rendre un collège électoral vacant, pour faire rentrer M. Groen van Prinsterer dans les chambres. Tout cela indique que si l’opinion se calme dans ses manifestations, elle ne se rattache pas au ministère, qui aura inévitablement à subir une rude épreuve, lorsque les états-généraux se réuniront de nouveau d’ici à deux mois. La lutte sera sans doute sérieuse et décisive entre les partis.

Au milieu de toutes les questions qui s’agitent au moment présent dans le Nouveau-Monde, il n’en est point de plus grave que celle de l’élection présidentielle qui se prépare aux États-Unis. Les altercations, suivies de voies de fait, qui ont eu lieu au sein du congrès entre M. Brooks et M. Sumner, et qui ne sont point du reste les seules de ce genre, montrent assurément ce qu’il y a de violent et de bizarre dans les mœurs américaines. Les troubles du Kansas sont un épisode de guerre civile assez curieux et assez terrible, la querelle de l’Union avec l’Angleterre au sujet de l’Amérique centrale implique certes les intérêts les plus sérieux ; mais ces diverses affaires, qui sont les principales ou les plus récentes, sont dominées elles-mêmes par cette autre question : À qui appartiendra le pouvoir ? C’est-à-dire, en d’autres termes, quel parti va triompher et régner durant la prochaine période présidentielle ? Le résultat du scrutin qui s’ouvrira bientôt peut influer également sur la situation intérieure des États-Unis et sur les rapports de la grande république avec l’Europe. Suivant les doctrines qui prévaudront, ces rapports pourront devenir faciles ou compliqués et hasardeux. Il y a déjà quelque temps que l’agitation électorale a commencé dans tous les états de l’Union, et le mouvement des candidatures se dessine assez nettement, quoique les chances puissent singulièrement varier encore avant le jour de l’élection définitive. Toujours est-il qu’au premier rang se trouve d’abord le candidat du parti démocrate. Le président actuel, M. Pierce, élu une première fois par ce parti, avait songé à se faire réélire ; mais il a dû y renoncer, il a été complètement abandonné. Une convention tenue à Cincinnati a adopté la candidature de M. Ruchanan. Le parti démocrate a du reste publié son programme en se ralliant tout entier à cette candidature. Il compte que la prochaine administration fera tous ses efforts pour assurer l’ascendant des États-Unis dans les eaux du golfe du Mexique et pour seconder la régénération de l’Amérique centrale, de même que pour assurer la liberté des communications entre i’Océan-Atlantique et l’Océan-Pacifique ; il considère en tout comme sacrés les principes compris dans la doctrine de Monroë. Le candidat choisi n’est point homme d’ailleurs à reculer devant l’application de ces principes. M. James Buchanan est depuis longtemps mêlé aux affaires de son pays. Il y a près de quarante ans qu’il a commencé sa carrière politique. Il a été successivement représentant, sénateur ; il était secrétaire d’état sous la présidence de M. Polk. Précédemment, sous l’administration du général Jackson, il avait été ministre plénipotentiaire en Russie, et, il y a peu de mois encore, il représentait les États-Unis à Londres.