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II. – STATISTIQUE VEGETALE. – DES INFLUENCES DIVERSES QUI DETERMINENT LA DISTRIBUTION DES VEGETAUX A LA SURFACE DU GLOBE.

Quel est le nombre total des espèces répandues à la surface du globe ? La réponse est difficile. Beaucoup de régions restent encore inexplorées, d’autres le sont à peine, et même dans les pays les mieux étudiés on découvre tous les ans des plantes nouvelles. Or le nombre total des espèces existantes ne saurait se conclure que de celui des espèces connues. Les appréciations des naturalistes ont donc nécessairement varié à mesure que l’inventaire des richesses végétales du globe s’est accru. En 1753, Linné connaissait 6,000 espèces. En 1807, Persoon en comptait 26,000. En 1824, Steudel portait le nombre des espèces à 50,000, et en 1844 à 95,000. Nous n’exagérons point en affirmant que les livres et les herbiers en contiennent actuellement 120,000 environ.

Du nombre des espèces décrites, les botanistes ont successivement conclu au nombre total des espèces existantes. En 1820, de Candolle l’estimait de 110,000 à 120,000. Seize ans plus tard, Meyen le supposait, sans pouvoir être taxé d’exagération, de 200,000 au moins. Par un calcul ingénieux de l’espace occupé sur le globe terrestre par une espèce, M. Alphonse de Candolle nous prouve, en 1856, que ce nombre ne saurait être au-dessous de 400,000 à 500,000, chiffre parfaitement en rapport avec celui de l’accroissement continu du nombre des espèces par l’addition de celles que les voyageurs apportent de tous les pays du monde. Quel champ ouvert à la curiosité humaine, mais aussi quel défi jeté au labeur le plus opiniâtre aidé de la mémoire la plus heureuse !

Le règne végétal se divise naturellement en deux grands embranchemens : les végétaux phanérogames, c’est-à-dire portant des fleurs apparentes et présentant, au moment de leur germination, des feuilles primordiales ou séminales, appelées cotylédons. De là le nom de végétaux cotylédonés, que de Jussieu leur a imposé. Tous les arbres, tous les arbrisseaux et la grande majorité des plantes herbacées appartiennent à cet embranchement. Les fougères, les mousses, les lichens, les champignons, tous ces humbles végétaux dépourvus de fleurs, dont la plupart semblent une ébauche imparfaite de la nature, font partie du second embranchement. Dans ces végétaux incomplets, les fleurs existent, mais cachées, ce qui leur a valu le nom de cryptogames. Tous germent sans feuilles primordiales ou cotylédons. De là le nom d’acotylédonés, qu’ils ont reçu de Jussieu.

Le premier embranchement, celui des végétaux cotylédonés, se divise, à son tour, en deux grandes classes : les végétaux dicotylédonés, qui germent avec deux feuilles primordiales ou cotylédons (cette classe comprend tous les arbres et arbrisseaux de l’Europe et