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règne végétal présente des diversités infinies. Le mélèze, le bouleau nain supportent des froids de 40 degrés au-dessous de zéro, qui congèlent le mercure, tandis qu’un grand nombre de palmiers, d’orchidées tropicales ou de fougères arborescentes succombent lorsque le thermomètre marque encore 10 degrés au-dessus de zéro. Il est des plantes qui vivent couchées sur le sable des déserts de l’Afrique, dont la chaleur atteint souvent de 60 à 80 degrés centigrades, tandis que les plantes alpines ou boréales se flétrissent ; si le thermomètre se soutient pendant quelques jours à 10 degrés au-dessus de zéro. Il est cependant encore un autre point thermométrique important à considérer, c’est celui où chaque espèce commence à entrer eu végétation. Une plante en effet peut supporter un froid de 15 degrés au-dessous de zéro et ne donner signe de vie que lorsque le thermomètre en marque 6 au-dessus. Il n’est point d’ami des montagnes qui n’ait vu avec ravissement les saxifrages et les soldanelles en fleur baignées par l’eau ruisselant des champs de neiges éternelles qui blanchissent les Alpes : cette eau a une température supérieure à zéro de quelques dixièmes seulement, et celle de l’air ne dépasse pas 5 ou 6 degrés. J’ai même vu la soldanelle fleurissant sous des voûtes de neige fermées de toutes parts. Dans ces cavités, la température de l’air et celle de l’eau sont nécessairement à zéro ; cette basse température est cependant suffisante pour faire germer et fleurir la soldanelle. D’un autre côté, les cocotiers et les végétaux de la zone torride sont insensibles aux températures qui n’atteignent pas 15 ou 20 degrés. Tous les printemps, nous avons la preuve de ces vérités. Nous voyons les plantes de nos jardins entrer successivement en végétation à mesure que le thermomètre s’élève au de gré où la chaleur agit efficacement sur leur vitalité. Chaque espèce a donc son thermomètre particulier, dont le zéro correspond à la température la plus basse avec laquelle sa végétation soit encore possible. Ce zéro est toujours supérieur à celui de nos thermomètres, qui correspond à la température de la glace fondante.

La plante une fois en végétation, quelle est la chaleur nécessaire pour amener l’épanouissement des fleurs et la maturation des fruits ? Longtemps on a cru qu’en comparant entre elles les chaleurs moyennes du printemps, de l’été, de l’automne, ou celle de douze mois de l’année dans différens pays, on arriverait à la solution du problème. Si l’on n’admire pas, disait-on, dans les jardins du nord de la France l’acacia de Constantinople, l’agave du Mexique, le nelumbo ou le lagerstrœmia de l’Inde, c’est que les étés ne sont pas assez chauds pour amener l’épanouissement de leurs fleurs, qui ne manque jamais dans le midi de l’Europe. Si on ne cultive plus la vigne dans l’ouest de la France, au nord de la Vendée, c’est, disait-on, parce que la température des étés et du mois de septembre est