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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 5.djvu/521

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Les divers effets qu’on pouvait prévoir se sont produits dans ces vingt-cinq dernières années. Quelques-uns, en se séparant du gros de l’église qu’ils trouvaient tiède, des dissidens qu’ils trouvaient exclusifs, ont creusé de nouveau la tradition, et ils ont cru se rapprocher de la vérité par l’archaïsme, car bien que cette petite église si préoccupée des choses liturgiques, cette église des Pusey et des Philpotts, soit tombée dans un formalisme qui a placé son déclin tout près de sa naissance, ce serait lui faire injustice que de ne pas lui reconnaître dans le principe quelque chose de plus sérieux et de plus élevé. L’éveil avait été donné par Coleridge à quelques-uns de ses fondateurs ; mais les uns, comme le père Newmann, sont allés fondre leur individualité dans le vaste sein du catholicisme, les autres se sont peu à peu renfermés dans un cercle étroit où ne pénètre guère la philosophie religieuse. L’aimable et vénérable évêque d’Oxford, qui porte si dignement le noble nom de Wilberforce, est peut-être le seul intermédiaire entre des nuances aussi différentes que celle des liturgistes et celle des méditatifs. Vers le centre de l’église, le savant archevêque de Dublin, le docteur Whately, et naguère encore l’archidiacre Hare, connu par d’excellens écrits, pourraient être regardés comme les chefs orthodoxes de cette école de foi et de réflexion qui doit sans doute à Coleridge son impulsion première. Cependant la vraie doctrine du théologien poète devrait être cherchée sous sa forme la plus régulière dans les ouvrages du docteur Marsh, président de l’université de Vermont ; mais comme avec un fonds véritable de christianisme il y règne un principe d’indépendance, on pressent qu’en regard de son développement rétrospectif, il a dû se produire un développement progressif, et auprès de l’archevêque de Dublin, à sa gauche pour ainsi dire, il faut placer le docteur Arnold, encore orthodoxe avec tous les caractères d’une originalité chrétienne. Après lui et dans le sens de la liberté viendraient les noms de John Sterling, dont Hare et Thomas Carlyle ont tous les deux écrit la vie, et surtout ceux de MM. Maurice et Kingsley, qui ont fait revivre soit un gnosticisme, soit un néo-platonisme chrétien. On pourrait citer d’autres noms encore, et il y aurait plus d’une étude intéressante à faire ; mais, forcé de nous borner et de choisir, nous ne parlerons aujourd’hui que de Thomas Arnold.


XIII

Nous l’avons nommé plusieurs fois. On ne peut aborder une discussion intéressant le dogme ou l’église, ou même les destinées de la société anglaise, sans rencontrer son souvenir. À peine cependant a-t-on entendu parler d’Arnold hors de son pays, et dans son pays sa mémoire est partout, partout on invoque ou l’on conteste son