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de ce pays, très nécessaires à son commerce. D’un autre côté, les navires allant de Java vers le Japon auraient pu également, sans dévier beaucoup de leur route, prendre des soies écrues et des articles de Chine, fort estimés à Férando. Échouant dans ce projet, les Hollandais avaient créé en 1624 une factorerie dans l’île de Formose. Cet établissement manqua son but, ne prospéra jamais et suscita finalement de si grandes difficultés entre les Hollandais et les Japonais, qu’une ambassade spéciale dut être envoyée de Batavia à la cour de Yédo pour les aplanir. Elle n’y trouva que des humiliations qui déterminèrent l’abandon de ce comptoir en 1661. Meylan fait observer avec raison que cet abandon fit grand tort à la position de Décima. Les flottes de la compagnie, attirées souvent dans les eaux de la Chine et du Japon pour le service de Formose, inspiraient encore un certain respect aux Japonais ; délivrés de cette crainte, ceux-ci purent imposer leurs volontés les plus absolues aux Hollandais.

L’exportation de l’argent fut prohibée en 1671 ; mais, l’or et le cuivre donnant toujours de très riches retours, la factorerie se serait facilement consolée de cette défense, si de funestes complications ne fussent survenues en même temps. À l’arrivée des navires de Batavia en 1672, le gouverneur de Nagasaki se fit remettre un cata logue exact et des échantillons de toutes les marchandises ; puis, par un traité avec les négocians japonais, dont les Hollandais furent arbitrairement exclus, il vendit de sa propre autorité les cargaisons à bas prix, en signifiant au chef de la factorerie de renvoyer ses marchandises à Batavia, si le prix ne lui convenait pas. Cette manière de vendre, qui prit le nom de commerce taxé, apporta une grande perturbation dans les affaires. Les réclamations réitérées de la régence de Batavia étant enfin parvenues jusqu’à la cour, un ordre de l’empereur rétablit en 1685 la liberté du commerce. Les Hollandais n’en jouirent pas longtemps, mais il faut dire qu’ils fournirent bien vite eux-mêmes aux autorités de Nagasaki de justes raisons pour mettre de nouvelles entraves au commerce : les navires qui arrivèrent en cette même année 1685 se trouvèrent remplis de marchandises de contrebande, qui furent saisies et confisquées pendant qu’on essayait de les décharger. L’enquête ordonnée par le gouverneur de Nagasaki compromit gravement le chef de la factorerie lui-même et deux de ses employés. Un arrêt de bannissement fut lancé contre les coupables. Trente-neuf interprètes japonais, complices de la fraude, furent condamnés à mort. Les uns furent exécutés, les autres échappèrent au supplice par le suicide. À la suite de cet événement, l’empereur avait le droit de retirer absolument aux Hollandais les libertés dont ils faisaient un pareil usage au moment même où elles leur étaient rendues. Sans se porter toutefois à cette extrémité