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Vita di Dante de Cesare Balbo, sont les plus complets qu’on puisse désirer pour connaître la vie extérieure du poète et tous les personnages qui remplissent ses tableaux. Cette recherche des détails de vient trop minutieuse chez des écrivains comme Ponta, Giuliani et Torricelli ; on doit signaler cet écueil à l’érudition italienne. Un laborieux Français devenu Florentin par amour de la Divine Comédie, M. Colomb de Batines, a été l’un des plus zélés ouvriers qui aient travaillé à cette restauration de Dante : il a consacré sa vie à une Bibliographie dantesque[1]. Plusieurs savans, Volpi, Torri, Picci, Fraticelli, avaient déjà entrepris cette tâche sans pouvoir triompher des difficultés qu’elle présente ; M. Colomb de Batines l’a réussi. À part quelques erreurs signalées par M. Charles Witte dans son travail sur l’Ottimo Comento, la Bibliografia dantesca de notre compatriote est une œuvre d’une valeur inestimable.

La France, si bien représentée aux bords de l’Arno par l’érudition de M. Colomb de Batines, peut citer en ce concours tout un groupe de critiques supérieurs. J’ai déjà mentionné MM. Villemain, Fauriel et Ozanam ; ajoutons à leurs travaux le Voyage dantesque de M. Ampère, que les lecteurs de la Revue n’ont certainement pas oublié. Si l’étude souvent minutieuse des détails est le domaine des Italiens, l’appréciation des beautés poétiques a été le triomphe de nos compatriotes. M. Villemain expliquant à grands traits l’imagination du Florentin, M. Ampère cherchant dans les lieux qu’il habita les inspirations de ce peintre si expressif et si sincère, n’ont été égalés par aucun des critiques de l’Europe. Je retrouve ce caractère dans nos meilleures traductions de la Divine Comédie. Quelques fragmens trop peu nombreux de M. Antoni Deschamps avaient donné l’exemple d’une fidélité énergique et hardie ; après lui, M. Sainte-Beuve, dans ses Consolations, rendit avec grâce un des plus suaves passages de la Vita nuooa, et l’auteur de Marie, dans une prose sobre, nette, tour à tour énergique et charmante, suivit le vol du poète depuis les malebolge de l’Enfer jusqu’aux constellations du Paradis. Les traductions plus récentes, malgré des erreurs de système, attestent aussi cette même préoccupation du beau. La traduction de M. Lamennais

  1. M. le vicomte Paul Colomb de Batines habitait Florence depuis longues années ; il l’est mort le 14 janvier 1855, entouré de l’estime générale. La France doit un souvenir à l’homme modeste et laborieux qui a si dignement soutenu l’honneur de l’érudition française au milieu des savans de l’Italie. Outre cette Bibliografia dantesca, qui est le monument de sa vie, il a publié un grand nombre de mémoires et d’études dans les Studi inediti su Dante (Florence 1846), dans les Ricordi filologici e letterari (Pistoia 1847), dans l’Etruria (Florence 1851-1852), dans l’Archivio storico italiano (Florence), dans le Calendario Pratese, etc. On lui doit aussi une bibliographie du théâtre italien aux XVe et XVIe siècles, Bibliografia delle antiche rappresentazione italiane sacrée profane stampate net secoli XV e XVI (Florence 1852). Sa Bibliografia dantesca a été publiée à Prato en deux gros volumes in-4o, 1845-1846.