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des hommes d’esprit, et ne raconter que les actions des grands citoyens.

Cependant, si l’utilité est médiocre, l’intérêt de curiosité est grand selon nous, et le livre de sir David Brewster est attachant, bien qu’un peu diffus, et quoique l’auteur soit toujours monté sur le ton du panégyrique. Il y a même quelque chose de singulier à le voir s’efforcer d’être vrai, tout en voulant être toujours admiratif, et chercher à faire de Newton l’homme le meilleur et le plus juste de la terre, tout en citant de lui les lettres les plus vives et quelquefois les plus injurieuses pour ses adversaires. Il le représente à chaque page comme la douceur, la modestie, la candeur même, et à côté il imprime des documens qui le montrent passionné, défendant avec ardeur, avec injustice parfois, la priorité de ses découvertes et la vérité d’une admirable philosophie. Rien de tout cela n’est très-blâmable en effet, et l’amour de la gloire, la passion de la renommée, le sentiment de la supériorité ne sont pas chez Newton des sentimens coupables. Un Anglais peut bien les reconnaître chez lui, de même que les français savent les démêler chez Voltaire. Une sorte de patriotisme s’é meut trop facilement chez M. Brewster, qui a accusé injustement les Français du désir de déprécier un étranger j sans penser que les honnêtes gens, les libéraux de tous les pays, auront toujours du patriotisme au service de l’Angleterre.

Comme bien des hommes destinés à une longue vie, Newton naquit petit, faible et maladif. Son père, d’origine écossaise, s’appelait comme lui Isaac Newton et mourut peu de temps après son mariage avec Hannah Ayscough, deux mois avant la naissance de son fils. Il laissait à sa famille une ferme d’une étendue médiocre qu’avait achetée son père en 1623 et qui rapportait 50 livres (1250 fr.), et une petite maison qui existe encore. Cette propriété est située dans le comté de Lincoln, à six milles au sud de Grantham, dans ce pays qu’on appelle, à cause du climat, le Montpellier de l’Angleterre. Newton y passa sa première enfance sous la garde de son oncle James Ayscough et de sa tante, car sa mère se remaria en 1645 au révérend Barnabas Smith, recteur de Northwitham, où elle le suivit. L’oncle et la tante de Newton s’établirent donc à Woolsthorpe, d’où ils l’envoyaient aux écoles de Skillington et de Stoke. C’est là qu’il apprit à lire, à écrire et à compter : A l’âge de douze ans, il fut mis à l’école publique de Grantham, tenue par un homme instruit, M. Stokes, et comme la distance était plus grande, il logea à la ville chez M. Clark, pharmacien dans High-Street, et dont le petit-fils exerçait encore au même endroit en 1727, l’année de la mort de Newton ; On dit que jusque-là il avait montré d’assez grandes dispositions à apprendre, mais, les études devenant apparemment plus difficiles, il passa bientôt pour un