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Sidoine en fut indigné. Il vit aussi offrir et distribuer de l’argent. Les ariens (soit qu’on désignât par ce mot des fauteurs véritables de l’hérésie d’Arius qui se seraient déjà glissés à Bourges, soit qu’on donnât ironiquement cette qualification aux habitans suspects d’intelligence avec les Goths, aux faux Romains, tout disposés à se montrer faux catholiques), les ariens se tenaient à l’écart, écoutant, observant, pour cabaler ensuite et porter leur influence sur un compétiteur ou sur un autre. On remarqua, non sans étonnement, qu’ils respectaient dans leurs critiques la personne et les droits de Simplicius, et les amis du candidat ne manquèrent pas de tirer avantage de cet aveu, arraché, disaient-ils, par sa vertu à ses plus cruels ennemis. Comme on se trouvait en plein été, la chaleur de la saison ajoutait à la vivacité de cette lutte passionnée, dont les scènes se prolongeaient fort avant dans la nuit. Plusieurs des évêques étrangers, appelés par Sidoine et invités par la ville, étaient venus assister leur collègue, et formaient un petit synode dans les rangs duquel figurait un métropolitain, vraisemblablement Agraecius de Sens. Quand tout fut prêt, la basilique, convenablement disposée, s’ouvrit pour les opérations préparatoires de l’élection.

L’église métropolitaine de Bourges occupait l’emplacement où nous la voyons encore aujourd’hui à l’extrémité de la ville, près de la vieille enceinte fortifiée, et au sommet de la colline sur les flancs de laquelle se développait la cité gauloise d’Avaricum. Il ne reste rien aujourd’hui de cette basilique des premiers évêques : le moyen âge, qui ne conservait pas comme nous la trace des ruines qu’il faisait, en a effacé jusqu’au dernier vestige ; mais nous pouvons en quelque sorte la reconstruire par la pensée d’après les modèles du temps, particulièrement d’après l’église que Patiens bâtit à Lyon et que Sidoine a chantée, ou d’après la métropole de Clermont, ouvrage d’un successeur de cet évêque, décrite par Grégoire de Tours. On peut se figurer un édifice rectangulaire à trois nefs et à deux étages, dont le plafond, de bois précieux, sculpté et peint, posait sur des colonnes de marbre. Un riche pavé et de grands tableaux de mosaïque incrustés dans les murs composaient la décoration intérieure. Une galerie transversale séparait le sanctuaire des nefs. Le siège de l’évêque, sorte de chaise curule en marbre blanc, apparaissait au fond du chœur, dans un vaste compartiment arrondi, élevé de plusieurs pieds au-dessus du sol, et un portique à plusieurs rangs de colonnes, formant le vestibule de l’église, conduisait vers la porte extérieure, garnie d’un voile. Construites presque toujours sur ce plan, les basiliques du Ve siècle n’étaient pas réservées uniquement à la célébration des saints mystères : elles servaient de lieu de réunion pour la tenue des conseils du clergé, pour les élections épiscopales,