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Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 12.djvu/176

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plus énergique et des soins particuliers et continus, l’homme de l’art constate avec douleur qu’il lui manque une infirmerie qui soit à la fois le lieu et l’instrument de ses combats contre le mal. Il ne peut méconnaître qu’un système qui se réduit le plus souvent à l’expectation hippocratique, même dans un milieu des plus favorables, s’il suffit pour rétablir par son action continue l’équilibre des fonctions vitales quand cet équilibre n’est que légèrement dérangé, laisse de côté les meilleures armes de la science contre les causes actives qui précipitent la destruction de l’organisme.

En un mot, une infirmerie spéciale pour les aliénés manque à Gheel, et c’est là un grief sérieux de la science et de l’humanité. Ce complément de la colonie, réclamé par les médecins les plus éclairés, promis par le règlement du 1er mai 1851, ne paraît pas encore près d’être accordé. Le gouvernement belge y met de la bonne volonté, car il offre 150,000 francs pour cette création, à la condition que la commune contribuera pour une somme de 10,000 francs, payable en trois ans. Gheel refuse, et le gouvernement provincial, qui est à Anvers, ne peut ou ne veut pas peser sur ses déterminations. Étranger au pays, nous nous abstiendrons de prendre parti dans ce débat ; il nous sera cependant permis de dire que la commune de Gheel nous semble comprendre bien mal son intérêt. Pour une modique somme, qui grèverait légèrement un budget de plus de 100,000 francs, elle attirerait une clientèle nouvelle de pensionnaires qui accroîtraient l’aisance générale, et elle acquerrait au loin un renom plus favorable à sa popularité. Dans l’espoir qu’une idée juste associée à un sentiment philanthropique triomphera tôt ou tard, nous indiquerons, pour hâter ce moment, les considérations nombreuses et puissantes qui doivent déterminer le gouvernement belge, à défaut du concours municipal, à prendre entièrement à ses frais une dépense qui ne serait improductive ni pour les finances, ni surtout pour l’honneur de la Belgique.

Dans l’infirmerie seraient provisoirement déposés les convois de nouveau-venus, et ils y attendraient, dans les conditions les plus propres à faire juger de leur état, leur placement définitif. Là seraient reçues les folies d’un caractère exceptionnellement dangereux, qui sont repoussées de Gheel, telles que les monomanies incendiaires, homicides, suicides ou érotiques, sujet de hautes études pour la science. La surveillance et la contrainte pourraient y être exercées comme ailleurs, en même temps que le malade profiterait, dans ses périodes intermittentes, de quelques-uns des avantages de Gheel les plus propres à consolider des améliorations toujours incertaines dans un asile muré. Là encore seraient traitées, avec une énergie proportionnelle à l’énergie du mal, les crises aiguës, lesquelles offrent de nombreuses chances de guérison. Grâce à une in-