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de ce superbe établissement d’Anzin, qui a aujourd’hui 50 puits de mines en activité, possède 50 machines à vapeur d’une force totale de 1,550 chevaux, et donne du travail à 8,500 ouvriers recevant ensemble un salaire annuel de 4 millions de francs. Constitué en 1757, presque immédiatement prospère, saccagé avec tout le pays par les Autrichiens en 1792, — époque à laquelle 4,000 ouvriers extrayaient déjà annuellement 3,750,000 quint, métriques de houille par 37 puits (on dit que jusqu’alors plus de 150 avaient été creusés) avec 12 machines à vapeur, — exploité un moment par l’état, reconstitué bientôt sur des bases puissantes qui l’ont amené au degré de prospérité dont il jouit de nos jours, le centre houiller d’Anzin, dont la valeur est approximativement représentée par un capital de 43 millions de francs, produit maintenant 12 millions de quintaux métriques de charbon, c’est-à-dire le sixième de l’extraction totale de la France. En 1699, le pauvre village d’Anzin avait 221 habitans ; ce nombre s’élevait à 2,898 en 1801 ; aujourd’hui la commune d’Anzin en compte 5 ou 6,000. À cet accroissement de population correspond un progrès équivalent de l’industrie et de l’agriculture, qui a complètement changé la face du pays.

M. Édouard Grar, dans une remarquable histoire des mines, de houille du nord de la France[1], où il a mis au service d’un vif amour de son pays natal un grand talent et une érudition profonde, a rassemblé tous les élémens propres à faire connaître exactement l’origine du célèbre établissement d’Anzin. C’est la constitution définitive d’une portion française du Hainaut, en 1697, qui a été le motif déterminant des tentatives de recherche faites par ceux qui, après avoir participé aux richesses houillères de la portion autrichienne, s’en voyaient privés tout à coup. Les excitations du gouvernement français donnèrent lieu à d’innombrables explorations, à quelques-unes desquelles il contribua pécuniairement, mais dont aucune ne réussit. Sans se laisser effrayer par un infructueux engloutissement de capitaux considérables, comptant sur des connaissances techniques que ne possédaient pas ses prédécesseurs pour lutter contre les difficultés du terrain et l’abondance des eaux, le vicomte Desandrouin s’associa quelques hommes habiles, parmi lesquels les Mathieu, les Taffin, les Laurent, méritent d’être cités à côté de lui. Au commencement de 1720, c’est-à-dire au bout de dix-huit mois, l’audacieux explorateur tomba à Fresnes sur une couche de houille qu’il attaquait avec joie, lorsqu’à la fin de cette même année une irruption subite d’eaux, qu’il fut impossible de

  1. Histoire de la Recherche, de la Recouverte et de l’Exploitation de la Houille dans le Hainaut français, dans la Flandre française et dans l’Artois (1716-1791), 3 vol. in-8o.