Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 7.djvu/334

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faut travailler purement et simplement à le détruire. Alors s’allume une polémique qui s’en prend à tous les gouvernemens établis sans exception de la péninsule, non-seulement à ceux de Naples, de Florence ou des duchés, non-seulement à celui de Rome, mais à celui du Piémont lui-même, qui somme tous ces gouvernemens de changer de maximes, et qui les menace, s’ils n’obtempèrent à l’injonction, de se voir supplantés tous, — sans faire grâce à la maison de Savoie elle-même, — par quoi ? par la république universelle ! Et c’est ainsi qu’on prétend fermer les plaies de la malheureuse Italie !

Enfin un dernier sujet favori de la controverse des publicistes italiens, c’est la papauté. Qui penserait qu’il puisse entrer dans l’esprit d’aucun écrivain italien, à moins que ce ne soit un pur révolutionnaire, de proposer, à titre de remède aux maux de la péninsule, de porter quelque atteinte que ce soit à une institution pareille ? C’est pourtant ce que l’école du rinnovamento, quelque horreur qu’elle professe pour les sectes révolutionnaires, fait encore le plus naïvement du monde. N’avons-nous pas entendu l’abbé Gioberti, tout en protestant de son désir de sauver la papauté, tout en accusant même dans les termes les plus vifs les radicaux, qui demandent sa mort, de vouloir détruire en elle la dernière grande chose qui subsiste en Italie, ne l’avons-nous pas entendu réclamer, lui, la séparation du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel des papes, et on ne sait quel retour dérisoire aux temps de la primitive église, qui réduirait le souverain pontife, le chef spirituel de cent cinquante millions de catholiques, à la simple condition de curé d’une des paroisses de Rome ! Une fois cette voie ouverte, les radicaux, contre lesquels on s’emporte tant, ont beau jeu assurément, et il est difficile de leur répondre quelque chose de sérieux, quand ils demandent qu’on ajoute au programme, ou le déchirement définitif de l’unité catholique, et l’institution en Italie, en France, en Espagne, en Autriche, en Allemagne, et partout où il se trouve encore des sujets du saint-siège, d’église séparées et purement nationales, ou la déportation du pape en Syrie. Et quel est le prétexte de ces belles théories ? C’est que Pie IX, tout libéral et tout bon Italien qu’il était, n’a pas jugé convenable en 1848 de se mettre à la tête de l’armée romaine, — si armée romaine i) y avait, — et d’aller sur l’Adige guerroyer contre l’Autriche ! C’est qu’il a eu le grand sens de comprendre qu’à rêver au XIXe siècle le rôle d’un Alexandre VI ou d’un Jules II, le souverain pontife ne pouvait plus que compromettre et de la manière la plus grave l’intérêt essentiel du maintien de l’unité de l’église, sans espoir de servir en rien la cause de l’Italie ! Et voilà sur quels fondemens on demande, sous le nom de réforme de la papauté, une révolution qui bouleverserait de fond en comble la constitution religieuse de plus des deux tiers de l’Eu-