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des navires convoyés par des bâtimens de guerre, mais que dans ce dernier cas le droit de visite ne pourrait être exercé par des armateurs. Dans le fait, l’empereur Alexandre Ier déserta, dès le début de son règne, les principes que son aïeule et son père avaient si hautement proclamés. Ainsi, comme le dit Schœll avec raison, la Grande-Bretagne, en consentant à quelques modifications exigées par la justice, et en renonçant à la prétention de ce qu’on appelle le blocus sur le papier, obtint la reconnaissance de deux principes auxquels elle attachait la plus haute importance, savoir : 1º que le pavillon ne couvre pas la marchandise, 2º que la visite peut se faire sur des bâtimens sous convoi.

La courte paix d’Amiens suspendit un instant la grande affaire des neutres, que le congrès de Saint-Pétersbourg, on vient de le voir, était loin d’avoir réglée d’une manière satisfaisante. À la reprise des hostilités, elle se présenta aussi formidable, aussi difficile que jamais, et un échange de mesures violentes et attentatoires au droit des gens recommença entre la France et l’Angleterre, mais toujours avec le même caractère d’initiative de la part de celle-ci et de représailles de la part de celle-là, représailles quelquefois excessives il est vrai. Je n’ai pas du reste la prétention de donner ici l’histoire du système continental, dont l’origine, les développemens et les résultats ne sont que trop connus. Je me borne à rappeler que le fameux décret du 21 novembre 1806, dit décret de Berlin, qui le constitua, fut provoqué par la déclaration du blocus de tout le littoral compris entre, les bouches de l’Elbe et Brest, et que celui de Milan du 17 décembre 1807, qui mit à la disposition du système une arme terrible, le fut par la mesure qui imposait à tous les neutres chargés pour les ports placés sous la dépendance de la France une station forcée aux îles britanniques, et qui les soumettait à une contribution. Je ne dis rien du décret de Fontainebleau, peu facile à justifier.

Au surplus, quelles qu’aient été les violences accidentelles et provoquées du système continental, qu’on ne perde pas de vue que la France de l’empire pas plus que la France de la république ne prétendait les ériger en principes de droit. Que dit en effet le préambule du décret de Berlin ? Il reproche à l’Angleterre de ne pas admettre le droit des gens accepté universellement par tous les peuples policés, et par suite de faire prisonniers de guerre les équipages des navires de commerce, les négocians et les simples voyageurs, détendre aux bâtimens et marchandises de commerce et aux propriétés particulières le droit de conquête, qui ne peut s’appliquer qu’à ce qui appartient à l’état ennemi, enfin d’étendre à tout un pays des déclarations de blocus. En conséquence, l’empereur des Français annonce qu’il a résolu d’appliquer à l’Angleterre les usages qu’elle a consacrés dans sa législation maritime, attendu qu’il est