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l’exquise pureté des cavaliers du Parthénon, mais c’est la vigueur et la sévérité de l’art romain.

Il est difficile de bien apprécier le caractère de cette sculpture, et il est impossible d’embrasser la suite des faits qu’elle retrace, en la considérant d’en bas ; mais les bas-reliefs ont été gravés, et, ce qui vaut encore mieux, moulés en plâtre : quelques-uns de ces plâtres se trouvent à l’académie des beaux-arts de Saint-Luc, et dans la salle du Vatican où est la Bataille de Constantin, peinte à fresque par Jules Romain, un élève de Raphaël, Polydore Caravage, a reproduit plusieurs groupes importans de la colonne Trajane. À Rome, on peut souvent compléter l’étude des monumens anciens en visitant les monumens modernes ; tout se tient dans sa longue histoire. C’est ainsi que les arabesques des loges vaticanes remplacent pour nous et nous font connaître les décorations des palais de Néron, restituées et perfectionnées par le génie de Raphaël. De même entrez sous le portique de l’église des Saints-Apôtres, et vous trouverez là, encadré par hasard dans le mur, un aigle qu’entoure une couronne d’un magnifique travail. Vous reconnaîtrez facilement dans cet aigle et cette couronne la représentation d’une enseigne romaine, telle que les bas-reliefs de la colonne Trajane vous en ont montré plusieurs ; seulement ce qui était là en petit est ici en grand.

Pour achever le tableau de la vie militaire de Trajan, il faut aller regarder d’autres bas-reliefs empruntés à son arc de triomphe par Constantin, qui en a décoré le sien. Les uns se rapportent également à sa victoire sur Décebale, d’autres à ses victoires en Arménie et chez les Parthes. On voit Trajan haranguer ses soldats avec cette attitude simple et digne dont nous parle Pline. Sur ce point, le panégyrique de l’écrivain est confirmé par le témoignage de la sculpture. L’humanité du bon empereur, tant et si justement célébrée par son aimable ami, est aussi attestée par un de ces bas-reliefs qui représente Trajan distribuant des alimens aux nécessiteux, parmi lesquels, le premier, il comprit les enfans pauvres et les orphelins. On y voit encore une chasse, simple et mâle divertissement très cher à Trajan et digne d’estime, quand on le compare aux amusemens extravagans ou cruels de Domitien.

Constantin a aussi enlevé à un arc de triomphe de Trajan les statues de prisonniers daces que l’on voit au sommet du sien. Ce vol a été puni au XVIe siècle, car, dans ce qui semble un accès de folie, Lorenzino, le bizarre assassin d’Alexandre de Médicis, a décapité toutes les statues qui surmontaient l’arc de Constantin, moins une, la seule dont la tête soit antique. Heureusement on a dans les musées, à Rome et ailleurs, bon nombre de ces statues de captifs barbares avec le même costume, c’est-à-dire le pantalon et le bonnet, souvent les mains liées, dans une attitude de soumission morne,