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On vient de voir ce qu’Antonin le Pieux fit en ce genre. Marc-Aurèle fit moins encore ; mais son biographe remarque qu’il apporta le plus grand soin aux rues de Rome et aux routes. Quant à Antonin, il fit exécuter de nombreux travaux en Italie et dans les provinces. Il continuait ainsi la tendance cosmopolite des deux empereurs qui l’avaient précédé. Comme eux, Antonin était provincial. Une famille gauloise avait donné à Rome son empereur après une famille espagnole. Les monumens de Nîmes, dont l’architecture paraît convenir à l’époque d’Antonin, doivent peut-être la naissance à sa piété envers le lieu de son origine.

La rareté des documens historiques que nous possédons sur le meilleur des empereurs romains semble s’étendre à ses monumens. Chose triste, la mémoire la plus digne d’être conservée est une de celles qui ont laissé le moins de vestiges. On ne sait où était le temple consacré à Adrien, et la colonne Antonine, bien que l’inscription que Sixte V a fait placer à sa base dise qu’elle a été dédiée à Antonin le Pieux, ne l’a pas été à lui, mais à Marc-Aurèle. On ne peut douter que la colonne dite d’Antonin n’appartienne à son gendre, d’après les sujets représentés sur les bas-reliefs qui se rapportent aux campagnes de Marc-Aurèle contre les Barbares, et d’après une curieuse inscription trouvée dans le voisinage, qui contient la demande faite par un certain Adraste, affranchi, de se construire une petite maison près de la colonne du divin Marc-Aurèle, de laquelle il est l’intendant (procurator). On dirait aujourd’hui à Rome le custode.

Si Antonin a été un saint du paganisme, Faustine était loin d’être une sainte, bien que sa conduite fût beaucoup moins scandaleuse que celle de sa fille Faustine la Jeune, épouse de Marc-Aurèle. Ces excellens princes furent d’assez malheureux maris. Antonin du moins connaissait les fautes de son épouse, et en homme sage, dit son biographe, renfermait le déplaisir qu’il en ressentait. Pour Marc-Aurèle, il n’eut pas à exercer sa philosophie sur ses nombreuses infortunes domestiques, car il les ignora toujours.

Rome possède plusieurs portraits des deux Faustine. La première a beaucoup moins l’air d’une coquette que la seconde, mais elle est beaucoup moins jolie.

Si un homme pouvait mériter d’être traité comme un dieu, personne plus qu’Antonin et Marc-Aurèle n’aurait été digne de cet honneur. Il y a à Rome, près du Forum, un temple dont l’inscription nous apprend qu’il a été dédié par le sénat au divin Antonin et à la divine Faustine. Cette inscription peut désigner également Antonin le Pieux et Marc-Aurèle, qui, je l’ai dit, s’appelait aussi Antonin, comme sa femme s’appelait aussi Faustine. Cependant il est plus vraisemblable que le temple qui, fut consacré à Marc-Aurèle après