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de la terre de Van-Diémen. Quelques jours avaient suiïi pour avancer de bien des années peut-être le moment où la civilisation viendrait s’asseoir sur ces rivages.

Arrivés au point où s’étaient arrêtées les explorations du canot de la Truite, nous vîmes un nouveau golfe, et à gauche de ce golfe un immense bras de mer qui s’enfonçait encore vers le nord. Les vents malheureusement soufflaient de cette direction, et ils étaient trop frais pour nous permettre de tenter sans grande perte de temps une reconnaissance qui, pour être sérieuse, devait s’accomplir à loisir. Ce fut donc un travail que nous nous résignâmes à remettre à une autre époque, car nous ne quittions la terre de Van-Diémen qu’avec l’espoir et la ferme intention d’y revenir. Au fond de la baie des Tempêtes, sur la rive droite de ce bras de mer dont nous levâmes le plan l’année suivante, s’élève aujourd’hui la capitale de la Tasmanie, la ville florissante d’Hobart-Town. De rians hameaux couvrent les collines, des champs chargés d’épis ont succédé aux forêts, de nombreux navires se pressent à l’embouchure de la Derwent, cette rivière ingrate qui n’a point conservé le nom que nous lui avions donné. Nos prévisions sur l’avenir de cette magnifique contrée se sont réalisées,… mais non pas, comme nous avions le droit de l’espérer, au profit de la France.


II.

Le capitaine Cook avait fait en 1774 la reconnaissance de la côte orientale de la Nouvelle-Calédonie. Nous nous proposions, en quittant la terre de Van-Diémen, de reconnaître à notre tour la côte occidentale de cette île. Nous avions, pour atteindre l’île des Pins, séparée par un étroit canal de la Nouvelle-Calédonie, cinq cent vingt lieues environ à parcourir. Notre traversée fut facile, les vents soufflèrent constamment du sud-ouest, et le dix-huitième jour après notre départ nous aperçûmes l’île des Pins. Nous revînmes aussitôt sur nos pas pour contourner les récifs qui s’étendent au sud de la Nouvelle-Calédonie, et commencer à partir de ce point notre exploration.

Nous ne tardâmes point à faire l’épreuve des dangers qui nous attendaient dans cette pénible mission. Trois jours après notre atterrage sur l’île des Pins, nous pensions avoir doublé les récifs au vent desquels nous nous étions lentement élevés, lorsqu’au point du jour nous nous trouvâmes au milieu des brisans. La brise était très fraîche, la mer grosse, l’espace dans lequel il nous était permis de louvoyer extrêmement resserré. La Truite, qui se trouvait en avant de la Durance, touchait à sa perte. Quelques évolutions manquées