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en Italie, l’agression du roi d’Angleterre l’aurait exposé à des périls plus grands dans les plaines de la Picardie pendant que ses troupes combattraient au-delà des Alpes. L’une le menaçait d’une dépossession en pays étranger, l’autre d’une invasion en France. Aussi mit-il tout en œuvre pour maintenir dans son amitié le monarque anglais, qu’on captait par des flatteries, qu’on achetait par des subsides, et dont la duplicité intéressée égalait la fourberie politique de Léon X.

Henri VIII était attaché par de vieux liens à la maison de Bourgogne, qui avait constamment appuyé les prétentions des rois d’Angleterre sur les provinces occidentales de la France, et qui avait même aidé ses deux prédécesseurs, Henri V et Henri VI, à régner dans Paris. Héritier paisible des maisons de Lancastre et d’York, épuisées par quarante années de guerres dynastiques, il disposait en Angleterre d’une autorité qu’il pouvait pousser jusqu’à la tyrannie, et il était prêt à revendiquer sur le continent la Normandie, la Guienne, et même tout le royaume de France. Son mariage avec Catherine d’Aragon, dont la sœur aînée, Jeanne la Folle, avait épousé Philippe le Beau, père de Charles-Quint, l’avait étroitement uni à tous les ennemis de Louis XII et de François Ier. Il avait fait la guerre à l’un et l’avait préparée contre l’autre. Après la bataille de Marignan, il était entré en jalousie de François Ier, et, de concert avec l’empereur Maximilien et les cantons suisses dissidens, il avait projeté de le chasser de l’Italie supérieure, que ce prince victorieux avait recouvrée[1]. Pour la première fois, il avait laissé apercevoir la pensée de le déposséder de sa couronne. Cette couronne, il la réclamait pour lui-même, et Maximilien, encourageant l’ambition d’Henri VIII, n’avait pas craint de dire qu’il la mettrait sur sa tête[2].

Tous ces vains projets n’avaient pas résisté à la dispersion de l’armée de Maximilien, et ils s’étaient complètement évanouis à Cam-

  1. Dépêche de Bapaume à Louise de Savoie du 6 novembre 1515. Archives impériales, carton J, 965, liasse I, no 12. — Sir Richard Pace à Wolsey, dépêches du 12 novembre 1515, du 26 février et du 4 mars 1516. State Papers published under the antory of her majesty’s commission, in-4o’, vol. VI, 1849, pages 36, 39, 42, 47, 48. — Traité du 29 octobre 1516 signé à Londres, dans Roscoe, t. III, p. 96.
  2. « Atque etiam constituit (Maximilianus) gallicam ambitionem opprimere et pessundare, quo facilius majestas regia suum jus hæeditarium in regno Franciæ recuperet. » Dépêche du 12 novembre 1515, écrite d’Inspruck par Pace à Wolsey, ibid., vol. VI, p. 37. — « He wolde not only entre in to Itali to fyht with the frenchemen but also invade Fraunce. And for that intent he desirid your grace to move the kijngis Highnesse to do the same ; for he saythe that he will set the crown upon the kijngis graces hedde there. » Dépêche de Pace à Wolsey du 26 février 1516. Ibid., vol. VI, page 47.