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influence sur une partie assez considérable de la surface terrestre, sont indépendans des éruptions volcaniques. Les volcans, avant de décharger les vapeurs et les gaz souterrains, ébranlent fréquemment la région qui les environne ; mais cette agitation n’est que locale, et n’a point son origine à la même profondeur que les vibrations souterraines qui se communiquent à d’énormes distances : on en eut un exemple lors du fameux tremblement de terre de Lisbonne, qui se propagea d’une part jusqu’en Laponie, et de l’autre jusqu’à la Martinique. Les tremblemens de terre agitent fréquemment des contrées non volcaniques ; mais quand un volcan actif se trouve compris dans la zone d’ébranlement, il n’est pas rare qu’il préserve les villes qui l’avoisinent contre la destruction, et agisse comme une véritable soupape de sûreté. L’instinct populaire, qui a ses racines dans l’expérience des siècles, ne s’y trompe point, et dans les régions volcaniques, aussitôt que les premières secousses des tremblemens de terre se font sentir, on interroge avec anxiété l’état du volcan voisin. Pendant le tremblement de terre qui vient de se faire sentir dans une partie du royaume des Deux-Siciles, Naples, si rapprochée du Vésuve, n’a éprouvé que des chocs trop faibles pour renverser les maisons, tandis que Potenza, la capitale de la Basilicate, a été presque entièrement détruite. Le Vésuve est, depuis deux ans environ, entré dans une période d’activité chronique, et, bien qu’au moment même des premières secousses il n’y eut pas d’éruption véritable, il est peut-être permis d’attribuer la préservation de Naples au dégorgement du Vésuve. Deux jours après le commencement du tremblement de terre, le volcan, jusque-là peu démonstratif, donna issue à une grande quantité de fumée, et rejeta des scories en grande abondance.

Dans les régions volcaniques des Andes, on se croit garanti contre les effets les plus désastreux des tremblemens de terre tant que les volcans continuent à fumer ; mais quand on voit disparaître les panaches blanchâtres qui en couronnent les sommets, on s’attend aux plus terribles catastrophes. Le 2 février 1797, le nuage qui environnait depuis des mois entiers le sommet du volcan de Pasto disparut subitement ; au même moment, la ville de Riobamba, qui est à soixante lieues de cette montagne, était entièrement détruite par un tremblement de terre qui ébranla une immense surface.

Il n’est pas sans intérêt de comparer la statistique des tremblemens de terre à celle des éruptions volcaniques, bien que nous n’ayons pour les établir que des documens encore insuffisans. M. von Hoff a publié dans les Annales de Poggendorf plusieurs listes des tremblemens de terre qui ont eu lieu dans les diverses parties du globe depuis 1821 jusqu’à 1836. Il suffit de jeter les yeux sur ce consciencieux travail pour voir qu’il ne se passe pas un mois sans qu’on éprouve des secousses sur un ou sur plusieurs points de la terre. Le nombre des éruptions volcaniques doit s’élever à peu près à vingt-huit chaque année sur la terre entière ; mais quoique ce chiffre ne soit pas très différent de celui des tremblemens de terre annuels, il n’en résulte pas clairement qu’il y ait une connexité directe entre ces deux ordres d’événemens, parce que les points terrestres où ils ont lieu simultanément sont, dans la plupart des cas, situés à des distances immenses.

L’activité interne de notre planète ne se trahit pas seulement par des effets dynamiques qui embrassent une partie considérable de la surface, elle