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habitant un climat plus chaud et voisin de la Chine, ils remplacent dans les jours de fête les peaux de mouton et les grossiers tissus de laine par des étoffes de soie richement brodées ; ils connaissent l’usage du thé et du sucre, et quelques raffinemens de la civilisation chinoise ignorés des autres nomades.

La plupart des cartes géographiques représentent parallèlement à l’Altaï sibérien une longue chaîne de montagnes, supposée d’une grande élévation, qu’on appelle Grand-Altaï, et qui couperait en deux une partie de la Mongolie. Les explorations de M. Atkinson lui ont démontré que cette chaîne n’existe pas : la Mongolie n’est traversée que par une ligne de collines qui n’atteignent jamais à une assez grande élévation pour mériter le nom de montagnes, et qui courent transversalement à la direction du prétendu Grand-Altaï. Les géographes ont été induits en erreur par des récits qui s’appliquaient à la grande chaîne des monts Syan-Tchan, placée beaucoup plus au sud, et qui sépare la Mongolie et la Changarie du grand désert de l’Asie centrale. C’est à cette chaîne des Syan-Tchan, dont une grande partie est couverte de neiges éternelles, qu’appartiennent le Bogda-Oola, un des pics les plus élevés de l’univers, et les volcans Pe-shan et Ho-theou. Pendant que les monts Alatou, un des rameaux des monts Syan-Tchan, se détachent vers le nord, dans la direction du lac Balkash, et comptent des pics élevés de 15,000 pieds au-dessus du niveau de la mer, le reste de la chaîne s’abaisse à mesure qu’elle se prolonge vers l’orient, et finit à l’état d’insignifiantes collines au milieu du désert. Comprises entre deux grandes chaînes de montagnes, les plaines de la Mongolie, d’où Tamerlan et Genghiz-Khan précipitèrent de si formidables invasions sur le reste de l’Asie, n’offrent point le caractère de désolation qu’on est trop porté à leur attribuer. Il ne faut point les confondre avec le Gobi, ou désert auquel elles confinent, et dont les prolongemens les envahissent sur quelques points. Elles renferment des richesses minéralogiques assez précieuses, et l’on y rencontre assez fréquemment, sous la forme de ruines qui inspirent aux Mongols une frayeur superstitieuse, les traces irrécusables d’une civilisation entièrement effacée. La qualité des eaux règle dans toute la Mongolie la condition du sol. Les rivières qui descendent des montagnes, ne trouvant aucune issue vers la mer, finissent toutes par former un lac dont le niveau est maintenu à une hauteur constante par l’évaporation due aux feux d’un soleil ardent : il suffit de gravir une hauteur pour voir scintiller à l’horizon quinze ou vingt de ces lacs, dont quelques-uns ont une étendue considérable. L’eau est-elle douce, les bords de la rivière et du lac auquel elle aboutit sont fertiles et couverts d’une végétation luxuriante, les coteaux sont revêtus de bois où abondent les sangliers, les gazelles et les loups. L’eau est-elle saumâtre ;