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IV. — CONCLUSION.

Ce douloureux événement, le retour de M. Barth, celui de M. Livingstone, et l’insuccès d’une vaste expédition qui se proposait de pénétrer jusqu’aux sources du Nil nous semblent clore une série des explorations africaines. Il y a encore des voyageurs en Afrique : M. Baikie est retourné sur le Binué et sur le Niger, et l’intrépide Burton se dirige du tropique à l’équateur dans l’espérance de voir par ses yeux cette mer Uniamesi que nous commençons à connaître par les récits des indigènes. Toutefois les grandes expéditions sont suspendues, les voyageurs publient leurs relations, et c’est pour nous le moment, après avoir écouté leurs récits et suivi les. vicissitudes de leur vie aventureuse, de faire un retour vers ce qui a été fait, de regarder ce qui reste à faire, et d’en peser, autant qu’il est permis, les résultats présens et futurs.

L’ensemble des tentatives qui se sont proposé pour but la connaissance de l’Afrique intérieure peut être partagé en trois périodes. La première s’étend de l’antiquité à la fin du XVIIIe siècle ; c’est un temps d’exagérations, de merveilles et de fables, où le peu de notions utiles et estimables que l’on ait possédées procédait encore d’Hérodote, de Strabon et de Ptolémée, car rien n’égale l’incurie des Portugais, indignes successeurs des anciens, sur cette terre où ils ont trouvé leur ruine pour n’en avoir voulu tirer que des profits matériels Si l’on interroge ceux de leurs missionnaires qui ont écrit des relations et si on leur demande des renseignemens positifs sur les régions dans lesquelles ils ont eu la faveur de vivre, ils répondent merveilles et miracles, racontant qu’il y a des montagnes d’argent, des lacs de bitume, et qu’une reine du Congo jetant ses filets dans une rivière en a retiré quatorze monstres moitié femmes et moitié poissons. Cette période de l’Afrique fabuleuse et primitive a son expression dans la carte du savant d’Anville sur laquelle à côté de grandes places blanches s’allongent quelques chaînes de montagnes indécises, quelques cours d’eau incertains, et se dressent presque autant de points d’interrogation que de légendes.

Mais Bruce se voue à la recherche des sources du Nil ; Houghton précède Mungo-Park dans les régions de la Haute-Gambie et du Niger ; Hornman s’élance dans ces profondes et sombres contrées du Soudan où il doit trouver la mort : une ère nouvelle s’ouvre pour l’Afrique, ère féconde que Clapperton et Lander ont fermée il y a trente ans en nous faisant connaître l’existence du Tsad et les embouchures du Niger.

À la suite de ces voyageurs, de leurs compagnons et de tant d’autres, dont la longue liste est connue, se présentent les explorateurs de la période actuelle, dont nous avons essayé de retracer les travaux en les montrant appliqués à rechercher les sources du Nil, à reconnaître les monts jetés sous l’équateur, à suivre les vallées du Haut-Zambèse, du Niger, du Shari. Ils sont partis munis des instrumens de la science et nous ont rapporté des notions exactes et précises, propres à redresser nos erreurs en ce qui concerne la topographie de l’Afrique : le Sahara est un plateau entrecoupé de vallées