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et les révélations de l’Italien, que voici. (Il n’y a pas eu la moindre peine à se donner : la seule vue de la chambre des roses l’a rendu expansif.)

« Christian Waldo est bien celui que vous cherchez. Il est beau et bien fait, son signalement répond exactement à la figure du faux Christian Goefle. L’Italien ne sait rien de l’homme à la tache de vin.

« La fameuse preuve, que je vous procure gratis, était cachée entre deux pierres, derrière le högar, dans un endroit très bien choisi, que je vous montrerai. Je suis allé la chercher moi-même, et je vous l’envoie sans savoir ce qu’elle vaut. Vous en serez juge. Je fais déjeuner M. l’Italien, dont le vrai nom est Guido Massarelli.

« Ne vous pressez pas de quitter la chasse, et ne faites paraître aucune impatience. S’il y a dans la pièce que je vous envoie quelque chose de sérieux et que ces bateleurs s’entendent avec le Guido, comme ils n’ont pu communiquer avec lui depuis hier, nous les tenons bien. Tous les chemins sont surveillés. Le Guido offre de se mettre contre eux ; mais je ne m’y fie pas. Si tout cela n’est qu’une mystification pour vous faire payer, nous paierons autrement, et nous paierons cher ! »

Ayant clos son bulletin, Johan le lia au portefeuille que Guido avait été forcé de livrer, et expédia le tout bien scellé à l’adresse du baron, au rendez-vous de chasse, par le plus sûr de ses agens.

XIII.

Il nous est permis, pendant que cette dépêche court après le baron, de courir nous-mêmes au chalet de Bœtsoï, d’où ce brave danneman voulait emmener Christian sans autre arme qu’une corde et un bâton ferré.

— Attendez ! dit le major, il faut que notre ami soit équipé et armé. Votre épieu est bon, maître Joë ; mais un bon coutelas norvégien sera meilleur, et un bon fusil ne sera pas de trop.

Cédant aux instances du major et du lieutenant, Christian dut endosser une veste de peau de renne et chausser des bottes de feutre sans semelle et sans couture, chaussure souple comme un bas, ne glissant jamais sur la glace ou la neige, et impénétrable au froid. Puis, l’ayant armé et muni de poudre et de balles, les amis de Christian lui mirent sur la tête un bonnet fourré, et l’on tira au sort les places pour la chasse.

— J’ai le numéro un ! s’écria le major tout joyeux ; c’est donc moi qui cède ma place à Christian et qui me poste à cent pas derrière lui ; le lieutenant est à ma gauche, le caporal à ma droite, à cent pas aussi de chaque côté. Partez donc et comptez vos pas, nous