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On a puisé les élémens de la viticulture algérienne à des sources nombreuses, en France, en Espagne, en Portugal, à Madère, sans se préoccuper suffisamment des expositions les plus convenables pour chacune des variétés de plants, ni du résultat que le mélange du jus de leurs fruits pouvait produire. Il règne sur ces différens points quelque incertitude, et des études attentives et patientes seront nécessaires pour fixer les idées, pour reconnaître les conditions de succès probable dans la culture des cépages destinés à produire des vins analogues à ceux des bons crus de la Sicile, de l’Espagne et du Portugal, pour rechercher enfin les meilleures variétés, les terrains et les expositions convenables à la production plus difficile des vins fins, ou seulement ordinaires, comparables aux vins des principaux vignobles de France[1]. Il n’est pas impossible cependant d’obtenir de bons vins en Algérie. L’amélioration réalisée dans ces produits depuis trois ans est déjà très sensible. Que les colons continuent donc leurs efforts en vue d’améliorer la culture de la vigne, le choix des cépages, les procédés de vinification, et ils parviendront à élever de plus en plus la qualité de leurs vins. Ils trouveront sans peine des guides certains en consultant les savantes publications de nos œnologues.

Parmi les produits de l’arboriculture, il faut encore compter les huiles comestibles[2]. Toutes les considérations que nous avons pré-

  1. Nous croyons devoir indiquer ici les résultats du concours institué à l’exposition de 1858. Les appréciations, soigneusement faites par MM. Andry et Bois-Duval, aidés par les membres de la commission spéciale de dégustation de la ville de Paris, M. Casterat et ses collègues, ont appris que sur 32 vins blancs envoyés des différentes parties de l’ancienne régence, 13 étaient devenus fortement acides, 10 autres avaient été dénaturés par des infusions de plantes odorantes; il n’en restait que 9 susceptibles d’être classés, tous de la récolte de 1857 : trois d’entre eux ont été distingués par la commission; un seul de qualité supérieure, offrant des garanties de bonne conservation, avait été envoyé par M. Coulon Denis, de Mascara. Parmi les 34 vins rouges qui figuraient à l’exposition, 27 ont dû être éliminés pour cause d’acidité ou de mélange d’infusions aromatiques, 2 seulement méritaient une distinction : l’un avait été envoyé par M. Finaton, d’Oran; l’autre était un vin rancio des vignes du père Brumauld, à Bouffarick. De tous, les meilleurs étaient deux vins de liqueur, l’un de la récolte de 1856, exposé par M. Cabassot; l’autre, provenant des récoltes de 1856 et 1857, obtenu par M. Allemand, de Milianah, et que sa qualité supérieure, son bouquet particulier classaient entre les vins de Madère et de Malaga.
  2. Nous ne pouvons parler ici des alcools considérés comme produits de la viticulture. Les alcools de cette classe n’ont pas figuré au nombre des produits algériens en 1858. On le conçoit, puisque la fabrication de ces alcools suppose la préparation d’un vin blanc de bonne qualité, résultat d’un choix particulier de cépages. Or c’est une base de production qui n’existe pas encore dans nos possessions africaines. Les alcools algériens sont tirés de diverses tiges sucrées, notamment de celles du sorgho. Nous avons déjà eu l’occasion de présenter comme douteux l’avenir de l’exploitation du sorgho en France. Cette année même, la récolte du sorgho comme fourrage a été fort compromise. En Algérie, les conditions sont meilleures, et cette belle plante y serait applicable à divers usages économiques.