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ils honoreraient ainsi la mémoire de savans et pieux missionnaires qui ont répandu un vif éclat sur les travaux de leur ordre.

Disons, en terminant, que le livre sur la Mission de la Cochinchine et du Tonkin présente, malgré ses lacunes, un intérêt particulier dans les circonstances actuelles. « En face des graves événemens dont les mers de Chine viennent d’être le théâtre et dans l’attente de ceux qui peuvent s’y accomplir dans un prochain avenir, on est porté généralement à interroger l’histoire, à lui demander des renseignemens sur les lieux où notre France semble appelée à jouer un rôle guerrier ou pacifique, mais toujours glorieux. » C’est ce qui, d’après la déclaration des pères de Montezon et Estève, a déterminé la publication immédiate du livre. On doit aux mêmes pères un résumé des notions géographiques que l’on a recueillies jusqu’à ce jour sur la Cochinchine et le Tonkin.


C. LAVOLLEE.


La susceptibilité proverbiale des poètes se manifeste en vérité tous les jours. A quelques lignes de notre revue littéraire du 1er août un des écrivains qui s’y trouvent nommés, M. Sébastien Rhéal, juge à propos de répondre par voie d’huissier. Quels. gros péchés avons-nous donc pu commettre en quatre lignes? Nous aurions méconnu la pensée, travesti les expressions de l’auteur, qui nous reproche surtout d’avoir rapproché perfidement deux passages de son recueil, l’un où il invoque le « pudique amour, » l’autre où il est question de « cimenter un glorieux festin. » M. Rhéal, qui tient à être le poète de l’amour pudique, se montre blessé de ce rapprochement irrévérencieux. Il affirme que la nature de ses vers est purement sociale, qu’il éprouve sincèrement les sentimens qu’il exprime, et nous n’entendons pas le contester. Sommes-nous donc coupables des malignes intentions qu’on nous prête? Peut-on induire de nos paroles que M. Rhéal ne justifie pas cette réputation de poète très pudique à laquelle il semble prétendre? Dieu nous garde de méconnaître à ce point les limites et les convenances de la critique! Si l’écrivain nous lisait avec des yeux moins prévenus, il reconnaîtrait que ce n’est nullement son caractère, mais son style que nous avons voulu mettre en cause, et comme des citations textuelles ne peuvent en rien affaiblir, sur ce terrain, la valeur de nos objections, nous n’hésitons point à reproduire intégralement ici les vers auxquels la critique faisait allusion :

— Ils regardaient danser une hétaïre au bal...
Elles avaient l’amour dont le miel les abreuve,
Mais non l’amour du beau, ni du national...
— Amour, pudique amour, conduis-moi, séraphin...
— Car tu viens cimenter le glorieux festin
Qui doit régénérer le vieux monde en déclin...


Maintenant nous engageons nos lecteurs à comparer notre critique avec le livre qui en a été l’objet. — Il résulte de tout ceci que la Revue aurait raison de ne pas s’occuper de certaines productions, et certes ce n’est pas elle qui y perdrait.


V. DE MARS.