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cestershire ou du Devonshire, avec ses espaliers de clématite et de jasmin, ses petits rideaux blancs, sa natte ou son tapis étendu sous une table savonnée, ses ustensiles de ménage brillans comme de l’or, tout cet ensemble d’ordre et de comfort dû à l’activité industrieuse de sa compagne assure à l’ouvrier des champs un bien-être qu’il ne trouverait pas hors de chez lui. Aussi le home lui est-il cher, et, sa journée finie, s’il s’arrache aux caresses de ses enfans frais et roses, c’est pour cultiver dans son jardin de belles fleurs qui, aux concours d’horticulture, disputent le prix à celles du seigneur, son voisin. Dans les grands centres de population, principalement dans les villes manufacturières, l’intérieur de l’artisan est souvent tout autre. Une chambre en désordre, une table grasse, un repas mal apprêté, des enfans sales et criards, une femme incapable de subvenir aux besoins du ménage, voilà ce qui l’attend le soir à son foyer. Alors il s’éloigne, va chercher des distractions dans le seul lieu qui lui en offre, à la taverne, s’enivre avec des maris mécontens, et revient chez lui pour maltraiter sa femme. On a plusieurs fois présenté à la chambre des communes un bill tendant à punir de la peine du fouet ces brutalités qui sont la honte des classes ouvrières de l’Angleterre. On les préviendra plus sûrement par un système d’éducation dont on trouve déjà d’excellens modèles dans plusieurs paroisses, et notamment à Sandbach, dans le comté de Cheshire. Là, toutes les jeunes filles apprennent à faire la cuisine et la lessive, à choisir les étoffes de leurs vêtemens, à les tailler et à les coudre. Le lavoir public, l’hospice, les maisons d’école, sont pour elles comme autant d’ateliers où elles font l’apprentissage de toutes les industries domestiques. Tout cela est d’une exécution facile, et l’on s’étonne qu’on n’y ait pas songé plus tôt; mais tandis que l’esprit humain s’épuise en efforts malheureux et va souvent s’égarer si loin dans l’utopie, il arrive que l’application des idées les plus simples demande des siècles.

Aujourd’hui cet enseignement professionnel et domestique est également introduit pour les enfans des deux sexes dans un grand nombre de workhouses. Depuis quelques années, il s’est formé des syndicats de paroisses pour un emploi mieux entendu de la taxe des pauvres, et les avantages de ces associations ont permis de donner une éducation professionnelle aux enfans, qui auparavant sortaient des workhouses sans y avoir appris aucun métier. La dépense annuelle faite pour chacun d’eux est de 350 francs, dont l’état prend un quart à sa charge.

Si l’exemple donné par les écoles industrielles a introduit l’éducation professionnelle dans les maisons des pauvres, il semble impossible que les écoles rétribuées ne soient pas bientôt gratifiées du